Une Reine s’en va

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La beauté de l’été n’a pas retenu Françoise Bougnoux de partir, nous l’avons hier jeudi 30 conduite au Funérarium, deux ans et demi après notre fils Brieuc, puis au crématoire. Ce visage, ce sourire qui ont illuminé ma vie sont donc ce matin réduits en cendres… Voici les mots que j’ai prononcés pour elle hier à la cérémonie.

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Herbeys, les hortensias

Nous nous sommes rencontrés voici cinquante ans pile, le 5 février 1966 ; mariés le 23 juin de l’année suivante, puisque nous venons de fêter le quarante-neuvième anniversaire de notre vie conjugale jeudi dernier, ce fut ton dernier repas, et grâce aux deux fillettes qui avaient broyé dans le jardin du sirop de menthe et nous le faisaient goûter, tout en escalandant le mur pour en proposer aux enfants de Manon, ce fut une soirée très drôle – la toute dernière pour toi, immobilisée dans ce grand lit médical disposé en travers du salon.

Le lendemain vendredi à midi, la visite d’Agnès ta sœur à laquelle tu dis adieu te plongea dans une sorte de coma, d’où tu ne ressortis que pour deux brefs délires – SOS Médecins appelé dimanche matin me dit que tu ne passerais pas la nuit, et le bon docteur fit le nécessaire en augmentant la morphine, croisée avec du valium, qui te firent en effet « passer », sans douleur me dit-on malgré les grands sursauts de ton corps pour quitter ce lit où tout te faisait mal. « Sauve-moi, sors-moi d’ici » m’as-tu supplié le dimanche matin en tentant d’arracher tes tubes, et ce furent tes dernières paroles, après quoi tu ne devais plus reconnaître personne, tu étais partie. Et à Herbeys que tu nous avais tant réclamé, tu ne monterais plus qu’en songe, vers ce rêve d’une maison habitée par Brieuc.

Herbeys

Depuis que ce cancer a été diagnostiqué au mois d’août 2015, à Briançon, j’ai, nous avons souvent pensé que tu mourais d’amour ; que plus fragile ou plus aimante que nous, tu n’avais pas surmonté le choc effroyable de sa mort en montagne, un beau jour de janvier voici plus de deux ans. C’est de cet amour, de l’extraordinaire qualité de ton amour que je voudrais témoigner aujourd’hui, où ceux qui t’aiment sont venus pour manifester un peu de ce que tu leur auras donné.

Tu m’as souvent demandé de t’écrire une lettre d’amour et je ne l’ai jamais fait, pourquoi ? J’avais envie de te répondre (avec François Jullien) que l’amour est bruyant, objet de déclarations, de déclamations. Tu avais par ta profession le goût d’expliciter les sentiments, de les préciser noir sur blanc ; et mon refus te répondait que l’amour vit aussi de tendresse, de silences, de connivences qui vont sans dire. Qu’expliciter un sentiment c’est parfois l’altérer, le forcer. Qu’une vraie proximité n’a rien à y gagner. Je ne t’ai jamais confié cette lettre, je n’ai pas su, pas pu. Mais je crois que nous aurons vécu ces 49 années très proches l’un de l’autre, malgré les anicroches, les turbulences ; je suis toujours revenu vers toi, avec l’évidence que tu n’avais nulle part de rivale, que c’est toi qui par-dessus tout me surprenait, que j’admirais, auprès de laquelle je me construisais.
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Tu n’étais pas toujours facile parce que tu étais exigeante et droite. Droiture, c’est le premier trait de toi que je retiens et les autres en découlent. Tu ne louvoyais pas, tu ne cédais pas sur l’essentiel ; tu avais des principes, des valeurs non-négociables. Donc des colères et quelques inimitiés bien senties, des emportements qu’au fond j’aimais, qui me stimulaient.

J’ai vérifié ta force de caractère au cours de ces dernières semaines. « Je suis romaine », as-tu affirmé à ton oncologue ; je reverrai toujours la scène où, aux quatre Reines Mages en blouses blanches venues à ton chevet, au pavillon des cancéreux de Daniel-Hollard, te présenter leurs propositions de soins, la chirurgie, une nouvelle chimio, une autre radio-thérapie, en bref « plus de la même chose »…, tu as calmement répondu à ces femmes-thaumaturges que tu fixais en face du fond de ton lit : rien de tout cela, accordez-moi seulement de me faire calmement mourir. Ce grand moment de relation clinique a jeté un froid ! Mais je peux dire aussi que te veiller dans tes derniers temps, aux soins palliatifs du CHU puis durant ce coma final de trois jours, est un privilège qui marque d’une expérience indélébile toute ma vie.

Ta deuxième qualité principale à mes yeux aura été ta perspicacité, ce don de voir à travers : difficile de t’embobiner, de te mener longtemps en bateau ! Au cours d’une randonnée par exemple, ou dans la visite d’une ville inconnue, ou dans nos nages autour du rocher de Centuri, tu montrais un étonnant sens de l’orientation qui va me manquer.

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Tu étais émerveillée par l’enfance, quelles relations tu auras eues avec tes enfants, et aussi ceux des autres !… Ils affluaient vers toi, tu les magnétisais. Et avec les gens simples, quelle qualité d’échange et de « plain-pied » tu montrais, cette façon de parler à tous les niveaux de la société, d’être à chaque fois à l’écoute, avec les autres ou de leur côté… Je le souligne tellement cela semble rare, pas donné à chacun. Tu adorais les marchés un peu pouilleux, tu y réalisais d’excellentes affaires. Quel flair pour dénicher à 40 € la paire de chaussure ailleurs affichée 200, le manteau ou la robe pas banale ! La vendeuse qui te cédait par caisses entières ses légumes ou ses fruits à bas prix te racontait parfois son histoire, et tu lui donnais en passant de bons conseils, une petite consultation vite fait entre les cageots de tomates ou les palettes de yaourts. Ta pénétration psychologique m’a toujours devancé, désarmé. Bluffé.

Tu étais photogénique (comme on le voit en ce moment), tu attrapais la lumière comme tu faisais des paroles, tu t’en nourrissais. Ton visage plus changeant que le ciel exprimait toujours un appel, un appétit de relations. Et les chapeaux t’allaient scandaleusement bien ! Quelle vivacité, quelle force d’entrain !

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En montagne, c’est toujours toi qui me tirais car je suis plus rêveur, plus casanier que toi. Je crois que tu as légué à tes petits-enfants cet appétit de marches, de grands espaces, l’envie toujours d’aller voir au-delà du col ou du promontoire, de découvrir et de situer l’autre versant du monde. De même nous aurons ensemble beaucoup voyagé, et tu échafaudais il y a trois mois encore des projets de Laos, de Birmanie…

Cet autre versant du monde, c’est aussi celui des êtres dont tu sondais la complexité, les caractères versatiles et qui te surprenaient toujours (que tu nous régalais à raconter parfois à table, sans violer le secret professionnel !). La grande force d’attraction que tu exerçais venait aussi de cette curiosité vraie, sans limite devant les méandres, les nœuds interminables de la psychologie humaine. Je crois que tu auras été une thérapeute hors pair (si j’en juge par mes propres expériences dans ce domaine), et que ta famille si équilibrée témoigne de tes vertus de psychanalyste (quand nous côtoyons tant de psys qui vivent, disons, dans la déglingue)… Dans ce domaine tu t’appliquais à lire, et à faire lire, avec acharnement ; tes groupes de formation ne voulaient plus te quitter, et nous entendrons tout-à-l’heure le témoignage de Frédérique, une de tes « élèves ». Je te voyais de même dévorer les romans, les films, les opéras qui n’étaient jamais pour toi de simples divertissements, mais des bulles chargés de messages remontés des profondeurs et que nous nous plaisions à longuement discuter. Nous tombions le plus souvent d’accord au sortir des films, et ça aussi c’était un critère, je vérifiais par notre communauté de jugement tout ce qui nous façonnait, nous reliait inconsciemment.

Il faudrait à ce sujet parler de nos maisons, de ces lieux de rêve que nous nous sommes donnés, et qui sont aussi des pièges à amis, à enfants. Elles sont à jamais habitées par toi, ou par Brieuc ; devant ces paysages que tu as si longuement contemplés, je sais que je regarde le monde avec tes yeux. De quels souvenirs, conversations enflammées, parties de fous-rires ou belotes acharnées ces murs résonnent ! Nos amis peuvent en témoigner.

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Parmi les traits à relever de toi, et dont j’essaierai de faire peut-être le tour ou le tri sur mon blog si j’écris jamais le roman de toi pour te réassembler, et présenter à un plus large cercle ce que furent tes visages…, il y avait plus secrètement la face obscure de tes doutes et d’une réelle difficulté à vivre, le démon de la dépression. Car ton dynamisme et ta formidable capacité d’être au monde s’arrachaient aussi à un fond de tourments intimes qui te mordaient, te tordaient. Tu étais beaucoup plus « en souffrance » que moi, dans ton corps (qui endura plusieurs cruelles opérations), dans ton âme et parfois tu me le reprochais : je ne pouvais pas tout-à-fait te rejoindre puisque je n’éprouvais pas l’angoisse ni tous ces mauvais rêves qui t’empêchaient de dormir. (Mais tu ne faisais pas que des cauchemars et Annie dira, je crois, l’un de tes derniers rêves – car tu y étais attentive et nous les racontais – le rêve de la lumière). En psychanalyse avec Marie Balmary au début des années 80, tu as formulé ce nœud fatal de ton caractère que tu m’as si souvent rappelé par la suite, ta naissance entre deux malheurs, Etienne le garçon mort et Christine ta sœur aînée, mongolienne.

Le caractère épouvantable de ton père que j’ai, en revanche, bien connu explique aussi beaucoup de ta réaction, de ta surprenante bonté : tu ne voulais surtout pas devenir la fille de cet homme-là ; ni de cette mère esclave, et au fond bafouée. Avec une folle énergie tu ne cessais de réagir contre tes parents, contre ton milieu ; tu n’étais pas faite au moule ; tu ne suivais jamais tout-à-fait, ni en montagne ni dans ta vie, les routes tracées. Tu t’inventais avec fraîcheur, et tu nous bousculais dans nos routines avec beaucoup de malice, de générosité.

En un mot tu donnais et beaucoup le sentaient, te le rendaient : dans les derniers temps les visites, les attentions délicates de nos voisins, les petites soupes (n’est-ce pas Camille, Simone, Anne, José ?…). J’espère allonger cette liste des donateurs un jour par un livre qui parlera de toi, te rendra par des mots bien pauvres cette vie si riche que tu nous as versée ; tu étais présente aux autres et tu étais toi-même un présent toujours renouvelé, disponible, un cadeau étonnant. Une fontaine de maternité. Tu nous émerveillais, je t’admirais, j’étais fier de toi alors que tu en doutais, je ne te l’ai pas assez dit.

Nos mots sont bien pauvres mais il y a heureusement la musique. Nous écoutions en entrant Wagner, l’ouverture de Tristan et Isolde que nous avons tant aimé – vu trois fois à l’Opéra-Bastille, écouté en boucle dans la voiture (Savone-Briançon couvrait à peu près les trois actes). Tu m’as redit aux soins palliatifs ton goût pour cette musique, ta nature wagnérienne : comment tu t’identifiais à cette succession d’enveloppes fluides, cette hypnose d’un mouvement qui tourne sur lui-même et pourrait ne jamais prendre fin. Nous terminerons tout-à-l’heure par l’acte II, tandis que vous vous approcherez du cercueil : prêtez l’oreille à l’enlacement vertigineux des deux voix, à leur délire d’aimer – un délire dans lequel s’insinue une troisième voix pour contrer ou suspendre l’ivresse des amants, la semonce de la servante Brangane qui les met en garde, la nuit va s’achever, le roi Marc les cherche et s’approche… Mais le sublime avertissement lui-même trop beau se fond, il s’harmonise au duo qui ne veut rien savoir, qui s’entête et s’en nourrit. Brangane intervient deux fois dans cet acte de chant et de chair, sans parvenir à l’interrompre.

D’autres musiques ponctueront notre cérémonie, une Gnossienne d’Eric Satie, solo de piano à la fois douloureux, fantaisiste et tendre, bien accordé il me semble à ton caractère, et un étourdissant boléro cubain (cha-cha-cha) que nous avons lui aussi follement écouté parmi d’autres, au cours de notre voyage là-bas. Deux chansons enfin, ou surtout, de Leonard Cohen : Alexandra leaving m’obsède depuis plusieurs mois, depuis que je te savais toi-même irrattrapablement  leaving ; et puis le grave et beau Who by fire, qui appelle ou frappe à la porte ? Quelle sorte de mort dois-je annoncer, par le feu, par avalanche, par le décret de sa maîtresse ou par ses propres mains ?

Françoise chérie, comment jamais te dire adieu ? Adieu non, mais te crier merci ! depuis chaque cellule de nos corps. Et maintenant, écoutons Alexandra leaving, où c’est une Reine qui s’en va.

Izouard, été 2013

11 réponses à “Une Reine s’en va”

  1. Avatar de ccc
    ccc

    Mon commentaire
    Chaque soir plus beau, ces derniers temps, le coucher de soleil sur Pierre-sur-Haute vu du Haut-Forez : ce combat entre le jour et la nuit, cette lumière, cette humidité qui gomme la martienne station hertzienne militaire, celle qui tirait les larmes du Petit Mario Meunier comme ce passage de Françoise derrière le voile…Merci pour ces prémices de lettre d’amour à Elle.
    C’était bien cela les silences du blog…vous étiez bien en voyage, un beau voyage aux portes de la vie. Puisse sa puissance vous accompagner dans votre solitude et dans cet éternel dialogue.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Catherine, Pour nous, quand nous vivions à la Rigaudie sur la commune de Saint-Pierre la Bourlhonne, le soleil se levait sur Pierre sur Haute, et se couchait dans la chaîne des Puys. Vous me rappelez des saisons bien lointaines, et toujours très chères au souvenir. Ah les souvenirs, c’est avec eux qu’il faut vivre désormais, et comme tout bascule…

  2. Avatar de Louise
    Louise

    Cher Daniel,
    Je viens de lire ces mots très beaux, très simples et si sincères que tu as prononcés pour Françoise au moment de la porter aux cendres. Merci de les publier sur ton blog : cela permet à ceux qui n’ont pu être à tes côtés comme moi de s’y associer à distance. Ils résonnent ainsi bien au-delà de vos montagnes chéries dans tous les cœurs et les esprits qui ont connu, ne serait-ce qu’un instant, l’ardeur si entière de Françoise.
    Chacun le ressent, elle s’est laissée mourir d’amour après cette épreuve finalement insurmontable de la perte de Brieuc. Sans doute faut-il pour survivre inventer de petits arrangements avec la mort, par l’écriture, la rêverie, le travail, la torpeur du corps ou même, oui, le rire, et Françoise n’était pas du genre à de tels arrangements.
    Aujourd’hui, c’est à toi de faire face à cette terrible brutalité d’une solitude qui ne sera plus l’espace doux d’une échappée, mais le socle dur de ton quotidien.
    À toi, désormais, de te laisser vivre d’amour.
    Oublier la maladie et tout ce qu’elle a dévoré ces derniers mois de votre vie, tout ce qu’elle a perverti, travesti en une caricature de la vie, réduite au seul souci des fonctions vitales qui, justement, ne le sont pas.
    Pour Françoise et pour Brieuc, mais aussi pour toi, tu vas retrouver la liberté de vos errances à travers les chemins de montage, les chemins de l’esprit, les chemins de l’art.
    Après la très longue maladie et la mort de ma mère, j’ai vécu avec mon père des moments qui, j’en suis sûre, sont parmi les plus beaux, les plus joyeux et les plus enfantins de sa vie. Notament lors d’un voyage en Corse, dont je ne t’avais pas parlé parce que c’était seulement pour nous deux.
    Un monde inattendu existe après ce qui semble la fin. Il va te falloir bien du courage et tout l’amour des tiens pour le découvrir, mais je sais que tu ne renonceras pas à épuiser cet inépuisable…
    Très affectueusement,
    Louise

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Merci Louise de parler, ainsi, d’expérience. Oui, je crois qu’une autre vie commence, encore difficile à imaginer, je l’ai écrit dans un billet précédent, je ne peux pas imaginer le monde sans Françoise et ces jours-ci je me heurte partout à elle. Que de choses à remettre à l’échelle de son départ, tout est bouleversé ! Et elle s’est enfuie si vite… J’espère bientôt te voir, en parler, une lettre comme la tienne compte énormément, je t’embrasse

  3. Avatar de Isabelle
    Isabelle

    je suis touchée dans l’humanité que nous portons/vivons et que nous partageons aujourd’hui de si près à travers vos mots, que je lis aujourd’hui. Si je la retrouve dans ce que vous projetez d’écrire, ce sera une expérience de fraternité, finalement tonique, dont nous avons le désir et la nécessité. Merci, beaucoup et tant bien que mal, votre soeur

  4. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    Cher Daniel

    Je découvre ton texte ce jour et la douleur qui te touche à nouveau. Je ne connaissais pas Françoise et la découvre un peu à travers les belles lignes que tu écris. J’ai entendu et pense comprendre le choix de ton épouse face à cette maladie. Accepter ou refuser les traitements ne changent pas vraiment le chemin. Il ne nous faut rien regretter et regarder devant avec le livre d’or du passé.

    J’ai partagé cette lettre avec mon épouse confrontée à des difficultés similaires. Cela nous a fait du bien de lire ensemble ce très beaux témoignage, avec les mots à poser sur des maux et un futur pour lesquels nous faisons peut être trop souvent silence et auquel nous allons être aussi confronté. La lecture de la traversée des catastrophes de Pierre Zaoui, plus travail de deuil qu’ouvrage philosophique avait bien aidé à une étape précédente. Nous en avions déjà parlé.

    Chaque récidive a été un nouveau chemin mais depuis début janvier nous somme sur le dernier chemin, une semaine à Daniel Hollard avec le ballet des blouses blanches d’une si grande humanité puis le lit médicalisé chez soi, faire face à une déclinaison très rapide, à la volonté d’en finir et un horizon de vie de quelques semaines. Puis un rebond inespérable, peut être grâce à la poignée de main de 30 mn de notre généraliste, la capacité à dire non et à différer un peu la nouvelle chimio pour être capable de la supporter, une sorte de pari.

    Chaque jour, chaque semaine sans autre horizon d’espérance que ce difficile équilibre entre évolution des indicateurs et dégradations par effets secondaires. Cela n’empêche pas de vivre au mieux chaque moment quotidien. L’amour partagé et le soutien des proches et voisins y est pour beaucoup.

    Oui, écrit ce livre Daniel déjà pour toi et aussi pour ta famille et surtout pour tes petits enfants. Ils auront besoin de ce témoignage et de cet héritage. Ecrit aussi sur ce blog comme tu l’as déjà fait. Nous avons besoin d’apprendre et de prendre le temps de partager.

    Une autre page s’ouvre pour toi, bien difficile pour arriver à d’autres possibles…

    Avec toute mon amitié et mon soutien moral.
    Jean Claude

  5. Avatar de BURDIN JEAN-PIERRE
    BURDIN JEAN-PIERRE

    Cher Daniel Bougnoux,

    Nous ne nous connaissons pas, même si je me suis manifesté dans un premier message au moment du départ de Brieuc. Puisque vous en parliez dans votre blog je me suis senti alors autorisé à partager votre peine, en faisant silence intérieur et à entrer en réflexion consonante avec ce que vous viviez alors.

    Peut-être plus qu’autorisé d’ailleurs, plutôt comme sommé par une exigence intérieure. Par votre confession vous deveniez un proche à entourer. Je ne peux pas trop parler comme le journal « La Croix » (excellent journal toutefois) qui vous héberge, peut-être parce que je lutte contre l’usure des mots, leur érosion et que j’en cherche plutôt l’ancienne nouveauté. Surtout des mots « forts » comme celui de compassion. On est humble devant des mots comme ceux-là. On ne veut pas les salir.

    Parce que peut-être aussi je crois aux communions et aux présences silencieuses.

    Juste donc une toute petite correspondance avec le Randonneur, d’abord lu parce qu’il se trouve être l’auteur des Pléiades d’Aragon dont à mon départ en retraite le syndicat m’a offert quelques uns des volumes..
    Plus tard, il y a quelques mois, je vous ai posté un message suite à votre billet sur la valse au cinéma. Sujet bien plus léger direz-vous ? Je n’en suis pas certain. Et le léger, le grave ?? difficile à dire et à penser. Dans mon mot je faisais allusion au cinéma de Max Ophuls, qui est un cinéma de la valse. Et bien cher Daniel, figurez-vous qu’apprenant les adieux prononcés au départ d’une reine, votre reine, à Françoise, je suis allé revisionner sur l’ écran du portable la petite vignette youtube de la valse finale de « Madame de… » de Max Ophuls. Je ne vois rien d’autres de plus beau, à mes yeux, à vous offrir aujourd’hui. C’est complètement indicible et pourtant cela dit tout de la vie, de l’amour et de la mort.qui les habite, les menace mais également les suscite et les re-suscite.

    https://www.youtube.com/watch?v=gdwcHw-wH2w

    Bien sûr comme il s’agit de la lecture d’une seule séquence du film, et de la dernière, la lecture ne peut en être que poétique. Ce caractère poétique en est renfoncé au détriment du romanesque. Le récit est pourtant lui aussi construit comme une valse. Mais c’est bien précisément cela que je veux partager. J’espère que vous n’en serez pas offusqué.

    Je vous redis mon attachement. Vous aurez la force de continuer, puisque pour une bonne part Françoise en est la source abondante et fraîche. Le souvenir bien sûr se métamorphosera, Je souhaite qu’il soit doux, apaisé et lumineux pour gagner en intensité, en amour redistribué .

    On vous lira donc à nouveau. Assez irrégulièrement toutefois car bien sûr si tout ce que vous abordez est toujours plein d’intérêt cela nous touche plus ou moins, c’est selon notre histoire, nos insertions et solidarités, nos chemins intérieurs et sensibles. Mais nous ne refusons jamais bien longtemps de vous suivre pour quelques incursions en terres inconnues !

    De tout mon cœur.

  6. Avatar de Milly
    Milly

    Bonjour,
    Votre hommage vibrant et si beau à Françoise est à la mesure de ce chemin exceptionnel que vous avez partagé. Exceptionnel à plus d’un titre, certes, mais je retiendrai aujourd’hui en vous lisant, qu’il fut exceptionnel car il a sans relâche interrogé l’humain, ses failles et ses grandeurs, ses victoires et ses batailles perdues avec au centre, l’amour sous tous ses visages.
    Les êtres les plus chers à nos yeux ne nous quittent jamais tout à fait: nous les incorporons, en quelque sorte; nous les portons en nous – ils sont les artisans de ce que nous sommes et du sens que nous accordons à la vie.
    De tout coeur avec vous et votre famille, Milly

  7. Avatar de leila kahouli
    leila kahouli

    Très cher Monsieur Daniel,

    Je lis ce très beau texte d’amour avec des larmes aux yeux…Comme est elle présente par et à travers vos mots très profonds et expressifs! .. Elle n’est jamais absente… Je suis très émue en lisant ce bel hommage exceptionnel et distinctif…
    Je vous souhaite beaucoup de courage… L’écriture d’un roman sur elle est une autre belle vie près d’elle.. Une continuation de ce vécu ensemble
    Que les beaux souvenirs de son visage rayonnant et de son beau sourire illuminent votre solitude, cher Monsieur Daniel!…
    Leila Kahouli

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Chères amies inconnues, Leila, Milly, vous m’encouragez à poursuivre ce récit d’une vie avec Françoise, et j’hésite car l’écriture du « roman » est toujours risquée, et je ne suis pas sûr qu’elle aurait aimé ça ; en même temps, l’écriture est la seule façon que je connaisse de donner vie aux fantômes, et de converser avec eux. Depuis sa disparition, Françoise est tellement présente, je me heurte à elle dans chaque circonstance, chaque lieu de notre vie… Cette expérience « spectrale » à elle seule mérite réflexion, et analyse : où vivent nos morts, comment maintiennent-ils avec nous le contact ? J’essaierai de traiter cette question dans un prochain billet – mais la famille (enfants et petits-enfants) m’entraîne demain en Corse, au nom des sacro-saintes « vacances » : vacances, c’est un mot qui sonne bizarrement depuis que Françoise est partie !

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À propos de ce blog

  • Ce blog pour y consigner mes impressions de lecteur, de spectateur et de « citoyen concerné ». Souvent ému par des œuvres ou des auteurs qui passent inaperçus, ou que j’aurai plaisir à défendre ; assez souvent aussi indigné par le bruit médiatique entretenu autour d’œuvres médiocres, ou de baudruches que je…

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À propos de l’auteur

  • Daniel Bougnoux, professeur émérite à l’Université Stendhal de Grenoble, est ancien élève de l’ENS et agrégé de philosophie. Il a enseigné la littérature, puis les sciences de la communication, disciplines dans lesquelles il a publié une douzaine d’ouvrages.

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