Le problème moral de l’euthanasie (2)

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Abuna Yemata 3

Il est très difficile de mourir, particulièrement en France. J’ai raconté dans la première partie de cette réflexion comment tu étais résolue à ne pas « traîner », de chimio- en radio-thérapies, de Daniel-Hollard en soins palliatifs… Et comment, grâce aux amis de l’association Ultime liberté, j’avais mis la main sur la solution (aux deux sens du mot), ce précieux sachet de 30 g de Pentobarbital qui vous procure la mort la plus douce qu’on puisse acheter…

J’ai dit aussi comment, assez ironiquement, nous n’avons pas eu besoin d’y recourir, la maladie nous prenant de vitesse pour déjouer nos plans. Le soir du jeudi 23, jour de ton retour à la maison, nous célébrions assez gaiement notre quarante-neuvième anniversaire de mariage, Mado et les deux fillettes entourant ton grand lit médicalisé qui trônait dans le salon pour un dîner plein d’entrain ; en suite de quoi sans prévenir, le lendemain vers midi, alors qu’en présence de ta sœur venue te voir d’Antibes tu nous réclamais avec insistance de monter ensemble une dernière fois à Herbeys, tu t’es ravisée au dernier moment, « c’est bien fatigant, plus tard peut-être », et tu t’es renfoncée dans un profond sommeil – d’où tu ne devais plus vraiment ressortir. Je t’ai veillée ces trois dernières nuits en dormant (mal) sur les coussins proches, j’écoutais ton souffle terriblement sonore, où semblait bouillonner une marée montante ; ou comme, à chaque respiration, des coups de cognée appliqués à un arbre, à l’arbre magnifique que fut ta vie.

Combien de temps pouvais-tu durer dans un pareil état ? L’infirmière ne se prononçait pas, on signale des comas de plusieurs semaines, soutenus il est vrai par une perfusion d’hydratation. Nous nous contentions de te brumiser le visage et la bouche, et dans la poche de la sonde reliée à ta vessie je voyais les urines passer de la couleur jaune d’or au brun, signe de déssèchement. La pompe à morphine équilibrait bien la douleur, les amis médecins qui te rendaient visite assuraient que tu ne souffrais pas. C’est au matin du dimanche que les choses se sont précipitées, quand tu t’es réveillée en tentant violemment d’arracher tes tubes, « Sauve-moi, tire-moi de là ! »… Tu ne buvais plus rien depuis deux jours, impossible de te faire avaler le pentobarbital. Je ne voyais que la solution de te placer sous perfusion, dans laquelle j’imaginais pouvoir glisser à l’insu de tous les 15 grammes fatidiques de la poudre diluée.

SOS médecins appelé à 8 h m’a envoyé un praticien, qui a évalué ta mort à 48 h maximum, mais m’a déconseillé la perfusion, « en l’hydratant vous ne feriez qu’allonger son coma ». Et comme si tu avais pu encore l’entendre ou réagir négativement, il m’a tiré dans une pièce voisine pour me chuchoter à l’oreille qu’il connaissait le moyen – si j’en étais d’accord – d’abréger ton agonie en augmentant la morphine, associée à quatre piqûres de valium… Ce que l’infirmière a aussitôt réalisé, en multipliant par huit le débit de la pompe, à quoi par précaution supplémentaire nous avons même ajouté sur ta cuisse un patch de 50 mg de morphine qui traînait dans le frigo… Je ne crois pas en effet que tu aies beaucoup souffert au cours de ce dimanche ; vers 17 h, les couleurs de ton beau visage ont commencé à virer vers la cendre ; à 21 h entre Pascale et moi, tu rendais ton dernier soupir.

Je suis très reconnaissant à ton dernier médecin de m’avoir, sans le savoir, épargné le geste euthanasique (que je t’avais promis et que j’aurais exécuté sans hésiter), et proposé spontanément lui-même, avec humanité, de mettre fin à ton état. Il existe donc en France des praticiens disposés à ne pas « tout essayer », prêts à subordonner les moyens techniques encore utilisables aux seules fins du patient ou à son désir. Mais si je suis revenu ici sur les conditions de ta mort, c’est qu’en matière d’euthanasie il n’y a que des cas, et qu’il faut maintenant à partir du tien essayer de tirer quelques réflexions plus générales.

L’euthanasie consiste, il me semble, à mettre la fin du patient en continuité avec sa vie, à faire de sa mort un acte qu’il puisse s’approprier, choisir et jusqu’à un certain point maîtriser. On a coutume de dire ou de penser « ma mort », et pourtant quel étrange usage du possessif si l’on songe que cette mort nous arrive généralement du dehors, aussi imprévue que subie ! Et comment dans ces conditions la rendre « mienne » ? Si les soins palliatifs consistent à maintenir le malade en position de sujet jusqu’au bout, l’euthanasie aussi ; il n’y a donc pas lieu de les opposer, celle-ci à mon avis faisant partie des ressources thérapeutiques au sens large (des outils du care) de ceux-là.

« Nous ne défendons pas la vie, mais la personne », écrit très justement Corinne Van Oost à la page 37 de son beau livre Médecin catholique, pourquoi je pratique l’euthanasie (Presses de la Renaissance, 2014), dont j’avais dit ici que je reparlerais.Trop de médecins se font en effet de « la vie » un fétiche, une impérieuse idole. En se barricadant par exemple derrière le commandement absolu « Tu ne tueras point ». Ou plutôt en brandissant une conception absolue d’un commandement ô combien relatif, si l’on songe aux circonstances et aux guerres qui ensanglantent la vie courante… Devant ce type d’entité, LA VIE, rappelons donc (suivant en cela une parole du Christ) que les principes sont faits pour l’homme et non l’homme pour les principes. Jésus s’affrontait aux pharisiens et aux intransigeants docteurs, comme les chercheurs de l’éthique se sont à toutes les époques opposés aux porteurs de ce que Nietzsche appelait la « moraline » – le bruyant rappel des principes, l’application éventuellement massacrante de la règle.

Une médecine paternaliste décide de ce qui est bien et de ce qui est mal pour le malade, sans assez entrer dans le monde propre de celui-ci ; elle le néglige comme sujet autonome doté lui aussi, à cet instant précis, d’un savoir intime. Une médecine relationnelle ou adepte du care l’écoute, et dialogue avec ses valeurs. Il faut toujours rappeler dans ce domaine que le monde d’un homme bien portant ne ressemble nullement à celui d’un patient, ces deux individus (mis en contact par la relation clinique) n’habitant pas le même monde. J’ai encore eu confirmation récente de ce point, au cours d’un dîner où la discussion tomba précisément sur l’euthanasie ; les convives, dont je découvrais la personnalité (catholiques traditionnels) se déclarèrent tous spontanément contre, à quoi une vieille dame, qui dînait à notre table d’un régime spécial adapté à sa maladie (cancer des intestins ?) objecta que, souffrante et se sachant peut-être condamnée à brève échéance, elle-même se déclarait plutôt pour !

On exprimerait la même idée autrement en soutenant que la mort, ou plus précisément l’évaluation de ce qui reste à vivre, n’est pas l’affaire du médecin ni ne relève de son domaine ; le sentiment ou ce que j’ai nommé dans un précédent billet le génie de vivre habite très variablement en chacun, il constitue notre réserve propre, notre trésor le plus intime. J’ai compris, pour avoir vu souffrir Françoise, à quel point la douleur bouscule tout ; devant ceux qui souffrent (physiquement mais aussi moralement, spirituellement), tous les principes « supérieurs » cèdent et il n’y a plus que des cas, c’est-à-dire un calcul des ressources disponibles, au ras des circonstances ou de ce qui nous reste. Tu avais, chevillée au corps, la volonté de partir sans attendre et cette volonté, horloge morale ou biologique ? s’est montrée la plus forte en précipitant ta fin, dès ton retour à la maison.

Les adversaires de l’euthanasie objectent aussi à ses partisans qu’il y a un danger évident de dérapage à prescrire la mort, ou à libéraliser l’accès aux substances capables de la provoquer. Mais qu’on lise sur ce point la loi belge du 8 mai 2002 (en annexe du livre de Van Oost), les gens ne vont pas se ruer plus nombreux qu’avant sur les seringues fatales, pas plus qu’en l’absence de celles-ci ils ne le faisaient sur les couteaux de cuisine ou les armes à feu. Ou plus précisément (car on n’a jamais empêché les gens de se tuer et le suicide n’est pas un crime), ceux provoqués par une douleur insupportable étaient eux-mêmes horribles, fusil de chasse pointé sous la mâchoire, sauts dans le vide ou sous un train… Devant l’impossibilité de se procurer aucune substance, un désespéré écrit sur les réseaux sociaux « Ne pourrait-on au moins me faire mourir comme un chien ? » (qui eux ont droit aux barbituriques ou au cyanure)… La mise à disposition d’une mort décente, dans ce contexte, n’est pas en soi « criminogène », elle marque un degré de civilisation supérieur, « une société qui admet l’euthanasie est une société qui a gagné en humanité » (ibid., page 83).

Il est évident que dépénaliser n’est pas prescrire, ni valoriser, mais reconnaître qu’il y a des cas extrêmes où la règle se trouve en défaut, et où c’est à la conscience, au colloque du malade avec ses proches de se prononcer. L’euthanasie suppose en effet un appel au dialogue, à une conscience élargie ; la loi (belge) prévoit autour d’elle des témoins, l’assistance de deux médecins et quelques délais de réflexion ; la décision ne se prend pas dans l’urgence, ni l’isolement. Y recourir constitue au contraire un moment éthique par excellence. La publicité (au sens kantien de l’Öffentlichkeit) lui est essentielle ; contrairement au suicide souvent pratiqué sur le mode « Après moi le déluge », le candidat à l’euthanasie consulte ses proches, il les réunit autour de lui pour un dernier adieu. Dans le cas de Françoise, non seulement les enfants mais quelques amis avaient été prévenus, et tous avaient donné leur accord.

En bref, la question de l’euthanasie me semble marquer un tournant important dans la réflexion sur les soins, la fin de vie bien sûr, la dignité du sujet, mais cette réflexion chez nous n’a pas abouti à des lois du type belge, pourquoi ? L’archaïsme français relève-t-il d’un blocage paternaliste, du corporatisme d’une profession ou d’une logique techniciste qu’il serait urgent dans plusieurs domaines (pas seulement médical) de dépasser ? Car personne ne veut d’acharnement thérapeutique mais comme on peine à définir celui-ci, dans le doute et au nom du sacro-saint « principe de précaution » – on s’acharne, c’est plus prudent ! Comme m’a répondu la femme médecin chargée d’organiser au sortir des soins palliatifs l’Hospitalisation à domicile (HAD), avertie que nous détenions une certaine substance, « si vous y recourez et que votre femme décède dans les prochains jours de sa sortie, je considérerai sa mort comme suspecte et j’ordonnerai une autopsie. – Pourquoi, puisque nous sommes tous d’accord pour cette solution ? – Cet accord ne vaut rien, un de vos proches pourra toujours se retourner contre l’hopital qui n’aura pas empêché la mort de votre femme et j’en serai responsable ! – Dans ces conditions, nous renonçons aux services de l’HAD et j’organiserai moi-même les soins de ma femme à domicile… ».

Ce que j’ai fait.

Il reste à cette étape de la réflexion à traiter chez moi précisément d’un reste, au sens lacanien peut-être, que vais-je faire des deux doses de pentobarbital stockées dans mon frigo ? Plusieurs, parents ou amis, m’en ont déjà réclamé une (l’autre par hypothèse me revenant). Au dîner des cathos que j’évoquais plus haut, mes commensaux se sont émus d’une situation où sur un coup de tête, un moment de déprime, on cède à la tentation de se supprimer, n’est-ce pas bien dangereux de conserver chez soi un pareil produit ? « Dans ce cas, confiez-le à votre meilleur ami avec mission de vous le rendre qund vous le lui réclamerez ! – Hou là là, vraiment je n’aimerais pas être cet ami… ». Réponse étrange, car qu’est-ce qu’un ami sinon quelqu’un avec lequel discuter de ce qui vaut vraiment de vivre et de mourir ?

L’éthique décidément a des progrès à faire, et ne le pourra que dans la discussion, et la « publicité », sans moraline ni grands principes aveugles aux cas. Car enfin, qui que nous soyons et tôt ou tard, le moment pour chacun viendra où il lui faudra BIEN mourir !

 

P.S. Je ne peux mettre sur ce blog les indications permettant de se procurer le produit cité, je tomberais sous l’accusation de publicité pour substance toxique interdite, voire de complicité dans leur trafic. Pour la même raison, j’ai modifié une première rédaction du billet précédent, qui risquait de nuire à l’association Ultime liberté, interdite elle-même de toute « réclame ». Mais la correspondance privée étant libre, j’enverrai volontiers par mail à qui m’en fera la demande les conseils qui permettent de le recevoir en toute sécurité.

La photo qui ouvre ce second billet (je ne sais si j’en posterai un troisième sur le sujet de l’euthanasie) montre Françoise au repos dans la grotte-narthex qui jouxte la chapelle décorée d’Abuna Yemata  (dans le Tigrée en Ethiopie, novembre 2014). J’ai décrit ici à l’époque notre ascension, périlleuse, vers ce lieu saint : son ouverture donne sur une falaise à pic de plusieurs centaines de mètres. Je ne sais pourquoi le visage de l’accompagnateur tel qu’il s’encadre sur le seuil rejoint pour moi, depuis ce deuil, celui des psychopompes ou des guides qui escortent, chez Virgile ou chez Dante, les âmes dans leur descente (leur montée ?) parmi les morts.

43 réponses à “Le problème moral de l’euthanasie (2)”

  1. Avatar de sabbath
    sabbath

    le probleme est effectivement le comment se procurer le breuvage

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Je vous réponds sur votre mail.

  2. Avatar de Président de AAVIVRE ... sa fin de vie
    Président de AAVIVRE … sa fin de vie

    Cher ami
    Je pense que vous avez la même vision que nous concernant la nécessité de libérer les individus en fin de vie, à leur demande, dans des conditions de compassion et d’amour.
    Je vous invite à lire notre approche pour une législation non pas d’euthanasie, mais de liberté pour l’individu et pour les praticiens qui pour la plupart oeuvre dans un art difficile mais reconnaissent la nécessité de permettre à un individu de dire STOP. La liberté pour les médecins de prescrire et administrer les soins, y compris la sédation terminale, est une liberté qui malgré qu’elle soit dans le code de déontologie médical est interdite en France.
    Ecrivez vos directives anticipées (voir le livre SURE-VIE sur notre site) et désignez votre personne de confiance. Nous accompagnons ceux qui le veulent et faisons valoir leur droit dans le cadre de la loi du 2 février 2016. Ensemble nous arriverons à ce la volonté de plus de 90% des Français soit traduite en législation appropriée.
    Cordialement
    Voir http://www.aavivre.fr

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Je lirai, certainement – mais plus tard, je suis actuellement au bout du cap corse, zone pauvre en téléphone et en connexions internet. Bien cordialement à vous…

  3. Avatar de Cécile d'Eaubonne
    Cécile d’Eaubonne

    Merci ! Ch.

  4. Avatar de Fauco
    Fauco

    Mon commentaire

    Bonjour,

    Merci pour vos deux articles.

    Nous serions très intéressés de recevoir de votre part toutes les informations utiles pour se procurer le produit cité. Nous sommes depuis de nombreuses années des militants pour la conquête du droit de disposer de sa propre vie.
    Merci d’avance. Très cordialement. J.J. Rofa.

  5. Avatar de cloclo54
    cloclo54

    Mon commentaire
    Bonjour et merci pour votre analyse très claire et tellement réaliste de ce qu’est actuellement la fin de vie dans notre pays. Déléguée-adjointe à l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité), j’habite à 7 km de la frontière belgo-luxembourgeoise, deux pays qui ont légalisé l’euthanasie;
    Je peux vous affirmer que les habitants de ces pays, (à part , comme toujours, les quelques opposants traditionnels qui ne veulent pas, ne serait-ce que réfléchir quelques instants à la demande d’aide des malades en souffrance) ne voudraient surtout pas revenir en arrière.
    J’ai des contacts quasi-journaliers avec des médecins belges qui aident des malades à mourir et je peux vous assurer qu’ils respectent leur loi à la lettre : Il faut que le malade soit atteint d’une maladie grave et incurable et qu’il obtienne l’accord de 2 médecins minimum lorsque la mort est prévue à brève échéance (moins de 6 mois en général) et obligation de voir un troisième médecin (psychiatre et/ou spécialiste de la maladie dont souffre le malade) si la mort n’est pas prévue à court terme.
    Il faut que le malade réitère sa demande d’aide plusieurs fois par écrit et c’est toujours le malade qui décide du moment où il souhaite être aidé.
    Ayant de la famille et des ami(e)s en Belgique et au Luxembourg, je peux vous dire que le droit à l’euthanasie les a libérés d’une énorme angoisse parce qu’ils savent que, s’ils sont atteints d’une maladie grave et incurable qui entraîne de grandes souffrances, (qu’elles soient physiques ou psychiques), ils pourront demander à être aidés à mourir et cela leur permet de vivre mieux et plus sereinement le temps qu’il leur reste à vivre.
    Comme vous le dites dans votre texte, combien de personnes en France se suicident de manière violente pour ne pas avoir à subir les souffrances d’une fin de vie et d’une agonie que les médecins prolongent abusivement ?
    Nous devons rester maitre de notre vie, jusqu’au bout et la fin de notre vie, c’est toujours notre vie. Ce n’est pas aux autres de décider à notre place, ces « autres » fussent-ils médecins !
    Je suis prête à échanger avec qui le souhaitera sur ce sujet délicat.
    Nous sommes plusieurs associations à défendre ce droit à une mort douce, rapide et surtout choisie, il faut que nos revendications communes s’additionnent parce que l’union fait la force, cette force dont nous avons tellement besoin pour nous faire entendre auprès des dirigeants de ce pays qui ne veulent pas d’une loi réclamée par plus de 90 % des Français parce qu’ils sont sous la coupe des lobbys pharmaceutiques et des ultra-religieux qui n’accepteront jamais que ce ne soit pas Dieu qui reprennent leur vie.
    En cela, aveuglés par leur croyance qui n’admet aucune réflexion, (et souvent encore en bonne santé), ils ne respectent pas le commandement de Dieu « Tu aideras ton prochain » parce que c’est justement leur prochain qui est en demande d’aide et c’est uniquement le prochain qui doit décider pour lui-même de ce que ce qui est bon pour lui ou pas.
    Les guerres tuent énormément de personnes en bonne santé, des jeunes la plupart du temps. Est-ce que nos dirigeants ont le même état d’âme lorsqu’ils envoient les soldats sur les champs de bataille ? La guerre tue, l’euthanasie soulage, là réside toute la différence !

  6. Avatar de JACQUELINE SALENSON
    JACQUELINE SALENSON

    QUE POURRAIS JE AJOUTER?
    euthanasie = mort douce choisie et décidée par une personne souffrante et incurable, en voie de mourir à plus ou moins long terme sans interventions médicales qui ne peuvent que prolonger une vie de souffrances

    alors oui, que chacun puisse décide pour soi et ses proches, et être aidé par un médecin si besoin.
    pour moi, c’est seulement le respect de l’autre.

    aide qui peut seulement être une ordonnance de médicaments

    aide plus poussée par injection de médicament menant à une mort douce, plus ou moins vite

    oui, on voudrait que les politiques (politiciens!) arrivent enfin à respecter les autres dans leurs choix, quels qu’ils soient, sans oublier que se suicider est une liberté républicaine

  7. Avatar de philippe chazot
    philippe chazot

    Mon commentaire

    Cher monsieur Bougnoux,
    Je suis l’un des responsables de l’association « ultime liberté » en ile de France et je vous remercie pour votre article. Vous nous décrivez une fin de vie particulière, ce que sont toutes les fins de vie et nous voyons bien à travers ce parcours les manques de la législation actuelle.
    Dans le post-scriptum de votre article vous avez l attention louable de ne pas nuire à notre association, puis vous indiquez à vos lecteurs « j’enverrai volontiers par mail à qui m’en fera la demande les conseils ect … »
    Je voudrai donc vous indiquer qu’ «ultime liberté » en tout cas en ile de France ne procède jamais de cette manière. Nous considérons que certaines informations touchant à la maitrise de sa fin de vie sont trop importantes pour être divulgué comme cela par mail. Si des informations circulent dans notre association elles sont transmises à une personne qui les demande par deux personnes de l’association dans un entretien en tête à tête. Nous considérons en effet que c’est une vraie responsabilité que de divulguer ces informations. C’est à chacun de prendre cette responsabilité face à la demande d’une personne et il n’y a rien d’automatique dans la réponse que nous donnons.
    C’est une question d’éthique, c’est aussi un gage pour la société que notre association ne fait pas n’importe quoi.

    P.S.
    Les coordonnées d’ »ultime liberté » pour chaque région sont sur notre site.internet

  8. Avatar de Maitea
    Maitea

    j’avoue que vos 2 posts me remplissent de perplexité : ainsi, la dignité de l’homme – être humain – n’est pas consubstantielle à sa nature, mais au sentiment subjectif qu’il s’en fait.

    Ayant veillé ma mère, absolument grabataire et incapable de remuer fût-ce la main, pendant plus de deux ans chez moi, je suis heurtée par votre mot de « déchet » visant les personnes incapables de se mouvoir. Bien entendu, vous vous faites l’écho de la réflexion de votre épouse, mais il dénote une vue productiviste, autant que centrée sur l’apparence, de la vie. Ma mère était-elle un « déchet » ? Il faut le croire, autant qu’imaginer que j’aurais pu, moyennant un peu de persuasion, lui susurrer le désir de mettre fin à une existence indigne, « déchectueuse ».
    Je n’y ai même pas pensé, j’ai raté le train de la modernité…

    J’ai également à plusieurs reprises, pris soin, à Lourdes, de grands handicapés, et vraiment, là aussi, le terme de déchet est injurieux. Il ne rend absolument pas compte de la complexité de la vie, du contact, de l’objectivité absolue de la dignité inhérente au corps humain, à la personne, corps et esprit – même absent.

    Cette notion de vie qui « vaudrait la peine », par rapport à une vie indigne est finalement la grande victoire posthume du nazisme : persuader des humains que leur vie, diminuée, n’est plus « humaine », qu’ils deviendraient des déchets. C’est la grande affaire de tous les tortionnaires que de persuader l’homme qu’il n’est plus « humain », que sa « dignité » est une valeur proprement individuelle – les juifs au seuil des fours crématoires, au bord des fosses, nus, humiliés étaient-ils moins humains que nous ? C’est ce que les nazis voulaient faire croire au monde, les clones psychiques qu’ils ont pondu en nos générations.
    Ma mère nue parfois, son corps déformé, était-elle moins femme, humaine que moi qui vous écris ? La jeune femme dont je changeais les couches à Lourdes était-elle moins femme que ma fille aînée dont elle était l’exacte contemporaine ?
    J’ai du mal à le croire.

    ma mère a eu la force morale extraordinaire de se remettre entre mes mains avec confiance et une sorte d’humilité devant la maladie, pour ses derniers moments. Sa dignité, son amabilité impressionnaient tous les soignants. Son « humanité » a connu son apex dans sa présence immobile, priante, et je ne peux que témoigner de mon regret que vous n’ayez pas connu de pareils moments avec votre épouse.
    L’abandon d’un malade aux soins qu’on lui prodigue sans autre désir qu’être là, totalement présent, aimant, est le cadeau sans prix, irremplaçable qu’il offre à ses proches.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Madame, Je trouve votre commentaire désobligeant : on ne débat pas d’un sujet grave en amalgamant les propos de l’adversaire aux pratiques d’extermination nazies, pourquoi pas Pol Pot, ou le Goulag ? Gardons notre tête je vous prie, et si je vous réponds c’est en espérant tracer une ligne de démarcation, mieux comprendre les adversaires de l’euthanasie et surtout rendre cette épineuse question discutable. Vous vous braquez sur un mot (alors que je vous en mettais sous les yeux plusieurs centaines qui auraient pu mériter votre réflexion), le « déchet », employé en effet au discours indirect libre puisque rapporté des propos de ma femme, qui craignait par-dessus tout la déchéance d’une fin de vie annoncée, et inéluctable. On dit que le cancer des os, dans l’échelle des peines, est un des pires, elle ne voulait pas l’endurer jusqu’au bout. Est-ce céder à un « sentiment subjectif » ? Oui sans doute, très puissant ; à une « vue productiviste » ? Ma femme a mené une existence très active, très dynamique et qu’elle faisait fructifier de mille façons ; être autonome, ne pas dépendre étaient pour elle une morale chevillée au corps. Cet idéal d’autonomie, et de maîtrise qui s’étend en effet aux conditions de notre mort, est une marque en général de notre modernité ; il est grotesque de lui chercher des racines du côté des nazis.
      Mais j’entends votre témoignage sur votre mère, car j’ai moi-même, dans mon adolescence, été associé par mon père (qui y était médecin) au pélerinage de Lourdes où je le suivais comme brancardier. J’ai compris là et comme touché du doigt « l’éminente dignité des malades » comme disait le prêtre dans ses homélies ; et je sais que la qualité de sujet ne se perd pas, au cœur des pires amoindrissements. Mais la douleur (physique, morale, spirituelle) n’a pas cette valeur et il est légitime de la combattre, ou de la fuir. Avec l’euthanasie, la clé est sur la porte : au nom de quoi s’en priver ? Ou, si l’on n’en veut pas pour soi, pourquoi la refuser aux autres (suspects de productivisme, de nazisme etc.) ?
      En ces matières où il n’y a que des cas particuliers, je crains l’arrogance et la « moraline » et j’ai envie de vous répondre : Fichez-nous la paix ! Le mot de déchet n’est pas inapproprié et je le reprends : la fin de vie est vraiment une déchéance, plus cruelle à certains qu’à d’autres ; une image de soi est blessée, souillée irrémédiablement, comment s’accommoder de cette perte, où est sa compensation ? Dans le regard des proches ? Oui, en effet, j’ai longuement veillé Françoise, je connais ces échanges de regards, la force de ces liens qui glissent au néant ; quand on ne peut plus guérir l’autre il reste à le soigner au sens du care, et tant d’humanité passe dans ces soins qu’on dit palliatifs !… Mais je vous dirai aussi (pour l’avoir constaté) que certaines personnes trouvent un narcissisme paradoxal à régresser, à revenir à l’allaitement, au pipi-caca des origines, je peux le comprendre mais ma femme n’avait pas ce narcissisme, elle mettait son image dans ce qu’elle avait fait ou conquis d’elle-même (orgueil productiviste ?), le sujet en elle ne voulait pas redevenir trop exclusivement cet objet ou ce déchet. Question de choix, de personnalité, d’histoires familiales – encore une fois il n’y a que des cas. J’entends donc le vôtre, admettez celui de Françoise (non dénué de « force morale » et que je partage entièrement), sa « maîtrise » ne mérite pas votre mépris, et puisque vous êtes apparemment catholique, priez pour qu’en France la loi change, et accorde aux gens de choisir leur mort. Cette liberté ne débouche sur aucun massacre, c’est au contraire l’interdiction qui pousse actuellement tant de malades au désespoir, et ajoute aux tourments.

  9. Avatar de Asia
    Asia

    Mon commentaire
    Vous soulevez là une question de fond, sur laquelle Daniel Bougnoux reviendra peut-être : quelle est la source de la dignité humaine ? Qu’est-ce qui rend une vie humaine « digne » d’être vécue ? Votre témoignage personnel nous montre avec force que l’intégrité corporelle n’est pas un élément nécessaire à la dignité. Mais il y a une distinction que vous ne faites pas et qui me semble essentielle : entre la dignité qu’une personne valide reconnaît à son parent diminué (grabataire ou en fin de vie), et le sentiment de dignité (ou d’indignité) que la personne elle-même éprouve ou appréhende. En l’occurrence, il me semble que tous les écrits de Daniel Bougnoux sur ce sujet témoignent du fait que jamais lui-même n’a jugé que la vie de son épouse ne valait pas d’être vécue. C’était son avis à elle, exclusivement. Et s’il faut une grande force morale pour accepter sa propre fin qu’elles qu’en soient les modalités, il en faut aussi pour renoncer à la vie. Elle n’était pas croyante (elle n’avait pas cette ressource) et ne plaçait pas le curseur de sa propre dignité au même endroit que vous. Et si elle souhaitait que l’on hâte sa fin, c’était aussi par abnégation, parce qu’elle pensait à sa famille. Au nom de quoi vous érigez-vous en juge du regard qu’elle portait sur elle-même ? Et pourquoi son mari aurait-il absolument dû faire la sourde oreille à sa demande lucide et répétée de ne pas « laisser faire la nature » ? Il s’est occupé d’elle avec autant de dévouement que vous l’avez fait vous-même pour votre mère. Et il l’aurait certainement fait encore pendant des années s’il avait fallu. Votre accusation de « vision productiviste » de l’humain est totalement déplacée en ce qui le concerne, et votre allusion au nazisme et aux fours crématoires inqualifiable.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Entièrement d’accord chère Ruth, je découvre ta réponse au moment de poster la mienne, nous
      convergeons (une fois de plus !).

  10. Avatar de Vyrgul
    Vyrgul

    Mon commentaireCela me dépasse que l’on puisse percevoir ainsi ces derniers billets autour de la disparition de Françoise Bougnoux. Le point de vue nazi était atrocement narcissique, totalitairement allergique à l’altérité et à ses droits, et définitivement incapable ( pour le pire ) de l’empathie qui est au fondement de toute nature humaniste. Tout le contraire de l’éthique, ou de l’art de vivre –si l’on peut s’exprimer ainsi en ces douloureuses circonstances- dont témoigne au travers de ces quelques lignes Daniel Bougnoux.

  11. Avatar de Cécile d'Eaubonne
    Cécile d’Eaubonne

    J’apprécie la longue rėflexion que Daniel et Françoise ont partagé jusqu’au bout de ce douloureux chemin de maladie. Et au nom du libre arbitre de chacun, je ne considère pas avoir à être privée de m’interroger sur l’euthanasie. A cause de mon adhésion à la Foi Catholique. Il me semblerait que celle-ci manquerait de réalisme, d’honnêteté en usurpant mon choix. Donc j’assume le fait d’y penser … sans l’évacuer.

    J’ai eu beaucoup de plaisir à suivre les voyages aventureux de votre couple, Daniel. Et je peux sans difficultés imaginer l’existence profonde et pleine de Françoise au service des siens, mais aussi de cette grande famille en humanité qu’elle s’est donnée à travers son mētier, vos amis. Elle s’est donnėe les moyens d’une bonne vie, en transformant au mieux les alėas qui sont le lot de chacun. Bien pour elle, bravo face à nous.
    Et si purgatoire , il y a … le décès de Brieuc et l’horrible maladie qui a rongé ses forces, l’ont placée sur celui-ci. Le prix des fautes à payer a été réglé …
    Et puisque que son cerveau est resté aussi vigilant et capable encore de rēflexions. Alléluia ! Car des dictats aussi inutiles que superflus ne l’ont pas dépouillés de sa mort.
    Un repos bien acquis. Bien sûr, je prēfère savoir que le Pento-Barbital soit resté au frigo.

    Puis-je espérer une plus grande comprēhension du temps de fin de vie quand j’aurai à mon tour à y faire face ? Évidemment.

    En attendant  » cela  » cause et m’interroge. Je reviens de plusieurs visites dans diffērentes maisons de retraite pour passer de trop courts instants avec des amis de 91 à 93 ans. Du bonheur, de les voir souriants et accueillants … A côtē d’eux, d’autres poursuivent leur existence douloureuse et solitaire à peine soulagée avec les secondes du temps volé au personnel hospitalier.

    Je n’ai nulle envie d’épiloguer sur la dignité en gēnéral de la personne humaine.

    Mais je sais ce que j’en espère pour moi. Et les choix de Françoise bougnoux me donnent du
    courage pour poursuivre la route qui est mienne.

    Le choix de mon destin, si possible ?!!!

  12. Avatar de Benoit
    Benoit

    Merci à Daniel Bougnoux et à La Croix pour ce récit.

    Mettre des mots sur la souffrance est le propre de l’humain. Et quand l’humain qui raconte a l’habitude de manier l’écriture et les idées, c’est très beau.

    Une femme est morte et quand elle est entrée en agonie, il a été réalisé ce que prévoit la Loi Léonetti dans sa dernière mouture, une « sédation profonde ».

    On peut discuter à l’infini sur le fait que tous les critères de la loi n’étaient pas explicitement remplis, le caractère multidisciplinaire, la traçabilité, et peut être aussi « l’intention de mettre fin à la vie » mais c’est jouer sur les mots.
    La loi Leonetti permet aujourd’hui en France de faire ce qui a été fait.

    Est-ce qu’il faut aussi, et je crois que c’est ce que souhaitait Daniel Bougnoux et son épouse, autoriser le suicide en pleine conscience et « sans douleur » avec des barbituriques ou d’autres substances comme en Suisse ?

    De mon point de vue aujourd’hui j’aurai tendance à répondre non, mais je ne suis pas très malade et aucun de mes proches ne l’est, sauf ma mère qui est en maison de retraite, démente et qui ne demande rien.

    Et si j »étais placé dans la situation de Daniel et Françoise Bougnoux, je ne sais pas si je persisterais dans cette opposition. Probablement pas.

    Tout ce que l’on peut en dire et c’est tellement dérisoire, c’est que cette situation est rare.

    Dans la nouvelle traduction de la prière du Notre Père, on dit maintenant … » ne nous fait pas entrer en tentation ».

    Après avoir lu ce qu’a écrit Daniel Bougnoux, je vais prier régulièrement pour ne jamais être tenté par une personne très proche qui en pleine conscience dit : je ne veux pas continuer à vivre comme cela, je veux partir doucement, toi qui est médecin, procure moi ce médicament miracle qui fait qu’on s’endort et qu’on ne se réveille pas »…

  13. Avatar de Jolo
    Jolo

    Bonjour Daniel,

    J’ai lu avec émotion vos deux articles et partage depuis longtemps cette vision de l’euthanasie non comme un suicide mais vivre sa vie debout jusqu’au bout. Oui, je désire recevoir les indications pour me procurer le produit cité qui changera en sérénité cette angoisse de ma fin de vie, angoisse malgré mon engagement dans ce combat pour suicide assisté et euthanasie. Serait-ce possible encore ???
    Bien à vous et merci pour cet article qui me touche profondément, merci pour votre engagement, ce combat est celui d’une humanité supérieure assumé.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      OK Jolo, je vous écris sur mon mail, bien cordialement, DB

  14. Avatar de Président de AAVIVRE ... sa fin de vie
    Président de AAVIVRE … sa fin de vie

    Daniel
    Je reviens vers vous à la demande d’une fondatrice de notre mouvement AAVIVRE … sa fin de vie en vous demandant votre accord pour référencer vos écris sur la fin de vie qui me semblent admirables.

    Je profite de l’occasion pour féliciter aussi la personne qui parle de la nécessité de réduire l’angoisse des Français devant une mort non maîtrisée. 90% des personnes qui ont accès au moyen de terminer leur vie paisiblement ne l’utilisent pas (Oregon) mais ils parlent tous de la sérénité avec laquelle ils envisagent leur passage de la vie à la mort, et cela au moment opportun et non pas comme aujourd’hui en France dans l’angoisse et en devant anticiper car ils savent qu’ils ne seront pas accompagnés … à temps. Pourquoi infliger une telle souffrance aux Français? de quel droit?

    Finalement je signale que nous avons créé une formation « Personne de Confiance » grand public et professionnelle, car dans l’état actuel c’est une action concrète pour aider ceux en fin de vie. Plusieurs situations se présentent qui démontrent l’hypocrisie de la législation actuelle et son inadaptation à comme vous le dite: chaque fin de vie est unique et mérite une réponse individualisée.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Je vous donne bien entendu mon accord , et j’espère échanger avec vous !

  15. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    Cher Daniel,

    Je consulte ton blog régulièrement mais souvent en décalage temporel. Je viens de revoir apparaitre dans la liste des derniers articles celui là publié en fin juillet : le problème moral de l’euthanasie (2), je viens de le lire (ou relire je ne sais plus) et constate que je n’ai rien écris ! C’est normal nous n’avons pas été synchrone mon épouse est partie fin septembre….Je reviendrai sur ces quatre petits points. J’ai aussi beaucoup écris, cela fais du bien !

    Je suis profondément contre « l’euthanasie », non pas contre le principe moral que tu défends et que je partage mais plus précisément contre l’usage de ce mot barbare qui contient entre autre le vocable de « nasie » que j’ai vu apparaître dans des commentaires avec la bonne orthographe. Je lui préfère grandement celui d’ »arrêter volontairement de vivre ». Nous devons nous réapproprier le sens des mots et des expressions en les rendant accessible, parlants et esthétique. Par le contenu que je vais développer, je t’inviterai volontiers à aborder la problématique première du « rapport à la mort dans la culture occidentale ». « Arrêter volontairement de vivre » est une problématique seconde, il me semble.

    Je reviens sur les quatre petits points …. Définir la mort biologie, cérébrale, sociale …
    Noelle à perdu connaissance le 22 Septembre puis a sombré dans un coma profond le 23, avant que son cœur cesse de battre le 4 octobre. Pour moi dans le cadre de ma culture et de ma spiritualité : Noelle a cessé toute vie humaine c’est à dire sociale et relationnelle le 23 et cela a été confirmé par l’équipe médicale le 26. Nous avons rassemblé la famille le 2 octobre pour honorer sa mémoire au Sappey en Chartreuse puis elle est décédé le 4 et a été incinéré le 6 avec dispersion des cendres sur la route du Charmant Som. Suivant chacun des membres de la famille, la date de prise en compte réelle du décès a été très variable. Pour moi le 26 fut le moment de l’effondrement. A partir du 4 les différents protocoles m’ont paru insignifiants voire morbides. Suivant les proches, cela a été très variable durant la semaine, dont le moment de dispersion des cendres pour une personne.

    Dans les commentaires suivants je vais reprendre quatre articles de mon blog que j’ai publié en octobre 2016 :
    De la perception de la mort en occident
    Pour le droit d’arrêter de vivre, en dignité et en pleine humanité
    L’urgence de vivre
    Un chemin pour la sérénité

    Je rajoute ici quelques commentaires d’une surprenante réalité. La culture occidentale est structurée autour du symbole de la croix, signe du passage de la souffrance pour une rédemption dans l’au-delà : le paradis avec cette question d’une récente actualité : peut-on disperser les cendres du défunt dans le cadre de la tradition chrétienne ?

    Aujourd’hui le « post humain » que je suis devenu grâce aux actions de Microsoft puis plus récemment Google, WordPress et depuis un mois Facebook est confronté à des phénomènes curieux. J’avais fermé le compte facebook de Noëlle, par soucis d’économie d’énergies liés à l’usage d’internet. Voila que jeudi dernier je reçois une invitation de Noëlle à devenir son ami ! Apres quelques recherches, j’ai trouvé qu’une de ses filles au canada a recrée une page facebook « Noëlle » pour garder une relation avec ses amis canadiens anglophones. Au-delà de cette surprise, se pose la question du devenir de nos données numériques dans les multiples applications disponibles. Il semblerait qu’un acte testamentaire en ce sens devrait être accompli !!!

    Il est vrai qu’aujourd’hui j’écris dans mes blogs en parti pour que mes petits enfants puissent disposer de mes écrits, de mes vidéos et de mes enregistrements sonores pour pouvoir accéder à l’âge adéquat à toutes ces informations et dans lesquels existe une vidéo d’une heure des mes parents racontant un peu de leur vie…..

    Autre regard, durant le vrai dernier chemin de Noëlle, le journal quotidien voire bi quotidien que je tenais à jour en septembre et début octobre, ainsi que les textes associés ont reçu de l’ordre de 4000 visites de la part de nos familles et amis dispersés en France et dans le monde depuis la Nouvelle Zelande et le Canada. Quelle belle incitation d’écriture tu m’as procuré cher Daniel, merci encore !
    Jean Claude

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Cher Jean-Claude, Quelle cotribution tu viens de faire à mes propres réflexions ! Je découvre tes cinq commentaires en rentrant de l’Opéra Pathé-Chavant et je dois partir demain aux aurores pour Paris, je valide donc en hâte tes papiers que je lirai à tête reposée demain (ou lundi car je pars pour trois journées de travail), je sais que nous avons beaucoup à échanger sur tout ceci, je t’embrasse fraternellement.

  16. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    De la perception de la mort en occident

    Depuis le trop célèbre « Je pense donc je suis » de Descartes, de nombreux intellectuels se sont appropriés cette phrase en la déconnectant de l’ensemble de l’œuvre de ce grand philosophe. La pensée occidentale a survalorisée le « Je », le sujet, le résultat, le but, la certitude, le statut et finalement la mort, le manque, la souffrance et la douleur au détriment de la vie. La vie c’est le processus, le chemin, l’acceptation de l’incertitude, des risques, de l’incomplétude mais aussi l’accomplissement du temps et dans la fin de vie l’accomplissement difficile ou en sérénité comme conclusion du grand récit subjectif de la vie.

    Aujourd’hui la pensée nourrie des sciences et de la sagesse des anciens me conduisent à inverser la phrase de Descartes : « je suis donc je pense ». Cette porte ouverte à la multitude, au mystère de la vie, de ce que je ne pourrais connaître, cette acceptation fondamentale de l’incomplétude et de l’incertitude de la destinée humaine devient libératrice et apaisante. Le « Je » du « je suis » est mystère, âme, ce qui anime le corps et lui donne forme humaine en ce qui concerne notre espèce. Cette âme qui n’a rien de transcendant au réel, se situe dans l’immanence même du vivant. Le « je pense » devient alors produit conscient donc déjà mort, « sujet » historique émergent de temps en temps et dans un espace bien limité de ce « je suis ». L’expression en son « âme et conscience » peut être alors revisitée en « vie et mort », en « chemin et état ». Cette âme, ce qui anime et donne vie englobe les différents états de conscience dans l’immensité de ce donc chaque humain ne peut accéder en conscience.

    De la dramatisation importante de la mort en occident résulte une angoisse de son approche aussi bien par la personne concernée que par les proches. Cette dramaturgie est amplifié par la culture chrétienne et encore davantage par les pratiquants de ces religions monothéistes. Il en résulte que l’attention est beaucoup plus portée sur les rituels funéraires, sur l’importance du corps même dépourvu de consistance humaine, en coma profond et en déliquescence fonctionnelle. Le corps de Noëlle est resté 11 jours en coma profond dans une chambre seule et devant un magnifique panorama, accompagnée à toutes heures par les proches et les amis.

    A contrario Noëlle en pleine conscience a été hospitalisée dans l’espace des urgences, très encombré de malades de toutes sortes, dans une grande souffrance psychologique. Durant 24 heures il ne m’a pas été possible de l’approcher et de veiller sur elle plus de 10 mn. Au bout de 48 heures elle a pu intégrer une chambre digne de ce nom et dans la structure adaptée à sa maladie. C’est bien sûr dans cette période qu’elle aurait du bénéficier de la belle chambre très accessible et non dans sa période de coma.

    Cette dramatisation de la mort induit un autre effet celui du deuil à faire après le constat du décès. Le noir, les mines déconfites, le rituel morbide de la mise en cercueil et des cérémonies qui suivent, cet appel au courage pour celui qui reste seul ne facilitent pas le cheminement.

    A contrario là encore, l’éthique de la joie de vivre même au plus près des derniers instants de conscience permet de laisser venir la sérénité et la paix intérieure qui sont contagieuses entre patient, proches et intervenants médicaux. La clé d’accès à cette posture sereine consiste à pratiquer le deuil anticipé, à accepter ce qui est, ce qui arrive et le terme d’une vie accomplie. Le sourire et l’humour sont alors accessibles et partageable. Il est clair que ce cheminement est beaucoup plus improbable dans le cas d’un accident et d’une mort brutale.

    Quand nous avons construit à deux la mémoire du futur de ce qui allait arriver, le chemin réellement vécu quoique un peu différent est balisé, c’est rassurant et apaisant. Chacun peut vivre chaque instant, pleinement pour ce qu’il est et dans une posture d’acceptation totale. Ce qui a nourri notre cheminement sera explicité dans un autre texte. Ce cheminement reste cependant difficile, il exige beaucoup d’énergie physique. Je suis sorti de l’ensemble du parcours de ce mois de septembre complètement épuisé physiquement alors que le coté mental est plutôt tranquille et serein.

    Jean Claude

  17. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    Pour le droit d’arrêter de vivre en dignité et en pleine humanité

    Nous avons réfléchi longuement et à plusieurs reprises pour écrire nos dispositions de fin de vie en essayant de suivre les évolutions des préconisations législatives. Pourtant le message était simple : après 72 heures de coma constaté chacun désirait arrêter de vivre d’une façon élégante et digne, humaine.

    La loi Léonetti est l’exemple même d’une loi bureaucratique incompréhensible au commun des mortels et même à des médecins. Il m’a fallu vivre l’expérience même du coma profond, pour comprendre la vacuité de nos écrits dans ce formulaire officiel et stupide. La novlang est bien sûr au rendez-vous. Sédations, sédation profonde, sont des termes techniques qui s’opposent à l’euthanasie dans la théorie. Dans la pratique la loi invite à la contourner. La bureaucratie c’est un cancer administratif, une obésité qui encombre les règles d’une gouvernance simple, accessible et efficace. La bureaucratie c’est aussi une forme de dépression chronique qui prend pouvoir sur les élus et les rend impuissant. C’est de la non gouvernance structurelle. Cela questionne les fondamentaux de notre démocratie bien malade

    La loi Léonetti comme la loi sur l’avortement ou encore la loi du mariage pour tous caractérise l’emprise de minorités actives religieuses et quasi institutionnelles qui visent à imposer à ceux qui ne sont pas concernés par de telles croyances ou fictions leurs modes de pensée, leur idéologie. La manipulation, la persuasion publicitaire idéologique ou commerciale, l’évangélisation des autres, porteurs de la bonne nouvelle sont des pratiques non démocratiques, despotiques et destructrices de la construction de chaque personne en son âme et conscience. Un quarterons de fondamentalistes, d’intégristes, d’arriérés du monde ancien qui devraient rester dans la sphère privée interviennent dans la sphère publique bafouant ainsi l’esprit de la loi de 1905.

    L’euthanasie, la sédation ou le suicide assisté, l’avortement focalisent l’attention dans la culture française l’acte de donner la mort, de tuer. La réalité est tout autre : il s’agit de donner la vie ou d’arrêter de vivre. A la différence d’un suicide qui relève d’un acte désespéré pour abrégé ses souffrances, choisir « d’arrêter de vivre » relève d’une décision consciente apaisée et réfléchie, discutée, de manière anticipée ou directe. Il ne peut être imposé à personne même à un professionnel médical de faire le geste irrémédiable. Cependant il faut pouvoir donner a chacun, à chaque personne de confiance la possibilité de réaliser le geste définitif d’une façon digne et humaine, sans avoir besoin de recourir à des processus illégaux, changer de frontière comme ont été obligé de faire des personnes pour avorter, pour une PMA, un suicide assisté.

    J’ai été confronté cette année à trois moments forts où la question s’est posée. En janvier, Noëlle m’a demandé de trouver un moyen pour mettre fin à sa vie. Cela a été très violent pour moi. J’ai fais des recherches sur internet. J’ai enregistré sa demande sur vidéo. Je lui ai dit que cela était possible, pas dans la durée de quelques heures ou quelques jours mais dans une temporalité bien plus longue de quelques mois. Il faut du temps, de la discussion et surtout prendre conscience que c’est possible. Cela l’a rassurer. Cela a permis à Noëlle de rebondir et de profiter ensemble de ce merveilleux bonus.

    En juin c’était tout autre. Dans notre dernière sortie en kayak, en corse, nous avons affronté une houle forte, entre des récifs. Je conduisais le kayak avec ma seule pagaie car Noëlle n’avais plus assez de force dans les bras. Les creux importants formés par les ressacs n’auraient pas permis à Noëlle de s’en sortir si le Kayak chavirait. Elle a décidé de rentrer vers des eaux plus calmes et nous avons effectué le demi tour, manoeuvre assez délicate pour retraverser entre les deux récifs dans la passe étroite qui s’offrait à nous. Nous avons ainsi regagné le calme plat de la baie protégée. Ce n’est pas très éloigné de cette expérience forte de vivre la vie de façon maximale et intensive, de la gagner à chaque instant : la vie au bout de ses doigts. Le tout est de trouver le bon dosage, la bonne position du curseur.

    Et puis est arrivé la dernière hospitalisation. Apres les 72 heures fatidiques de notre contrat moral, Noëlle en plein coma profond, j’ai décidé de déléguer la question de fin de vie au docteur en charge de la sédation palliative. Son humanité et celle de toute l’équipe professionnelle, m’a tellement réconforté que j’avais pas le coeur à lui poser un problème. Le coma irréversible de ce corps moribond en déliquescence n’étant plus Noëlle, j’ai décidé de faire entièrement confiance en l’équipe de l’institut, de me retirer et de clore ainsi mon deuil anticipé depuis déjà longtemps. Le reste ne fut plus que les gestes issus des traditions de l’ancien monde et je n’étais plus vraiment concerné, juste complètement épuisé.

    Jean Claude

  18. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    De l’urgence de vivre

    Dès les premières semaines de notre rencontre, en mars 2009, j’ai perçu l’urgence de vivre avec Noëlle, que chaque jour nous étaient compté. Peut être simplement par notre âge. Rapidement cette intuition s’est confirmée. Jamais nous n’aurons l’occasion de faire ce que nous avons tenté chaque année, chaque mois. Nous ne l’avons jamais discuté mais nous l’avons vécu ainsi. En avril mai 2009 nous avons effectué deux randonnées au sud Maroc, dans les dunes, sans enjeux mais aussi au nord de la vallée des roses autour de 2000 mètres d’altitude. Nous avons descendu l’oued en cru, couleur chocolat avec de l’eau jusqu’à mi cuisse. L’année suivante nous n’aurions pas pu. L’année de l’acquisition du vélo électrique ce fut des randonnées dans le jura. Puis ce fut le kayak ponté avec ce magnifique séjour en Bretagne en 2015. 15 jours après il y avait la tumeur au cerveau. Chaque fois que nous avons pu nous avons entrepris, au jour le jour.

    J’ai vécu ce sentiment étrange que Noëlle a été en pente douce de perte de capacité physique, chaque année. Nous nous sommes adaptés. C’est peut être en Bretagne que nous avons passé nos plus belles vacances et pourtant Noëlle était déjà bien diminuée physiquement. Chacun de nous deux a accepté cela et nous avons pu apprécier ces moments précieux qui nous ont été donné à vivre.

    J’ai appris à aimer les salles d’attentes médicales. Finalement être ensemble aux moments adéquats a été un vrai bonheur. Nous avons visité tout ce que Grenoble possède ou presque. Nous avions un contrat : Noëlle n’avait pas le droit d’être exposé au résultat d’un diagnostic sans que je ne sois présent pour la soutenir. Cependant je n’ai jamais assisté à ses séances de chimio ou de rayon. Cela aurait été du temps perdu pour moi et inutile pour elle, endormie ou schooté. Être vraiment ensemble était l’essentiel. Un coup de vélo, de marche à pied ou d’ambulance pour les déplacements. Parfois elle m’a demandé de l’accompagner où de venir a sa rencontre à pied ou en voiture. Elle avait un besoin vital d’assurer et de contrôler son autonomie. Etre ensemble aux moments désirés.

    Depuis décembre 2015 a commencé notre lente séparation. J’ai appris à vivre seul de plus en plus longtemps chaque jour. Nos temps de fusions se sont raréfiés. Pendant sept ans Noëlle s’est endormi dans mes bras, enlacées, sa tête dans le creux de mon épaule. Depuis décembre ce ne fut plus possible, trop douloureux pour elle. Nous nous sommes fait à cette raison. Noëlle ne pouvez plus corriger mes textes. Elle a augmenté ses périodes de sommeil. En Août elle a lâché la cuisine et ainsi de suite. Elle m’a ainsi préparé à vivre seul dans ce grand appartement. Depuis son départ rien n’a changé. Elle est là, présente dans ce que l’on a aménagé. J’ai appris à relire mes textes (mais pas aussi bien !) en repérant les phrases trop longues comme elle faisait. La vie continue pour moi, habité et transformé de sa présence. Sept ans et demi me paraissent une éternité. Nous avons souvent partagé ce sentiment d’éternité depuis notre rencontre.

    Jean Claude

  19. Avatar de Jean Claude Serres
    Jean Claude Serres

    Un chemin pour la sérénité

    En famille, à 15 heures avant de répandre les cendres sur les crêtes du Charmant Som, j’ai partagé quelques paroles extraites du livre la sérénité de l’instant de Think Nhat Hanh. Ces propos inscrits dans la culture bouddhiste nous ont habités chaque jour. Pourtant nous ne sommes pas bouddhiste, ni l’un, ni l’autre, au sens religieux du terme. Les voici :

    Il y a un mot dans le bouddhisme qui signifie « le fait d’être sans souhaits » ou « le fait d’être sans but ». L’idée c’est de ne pas placer quelque chose devant soi pour aller le chercher car tout est déjà là, en vous.

    La compréhension et l’amour ne sont pas deux choses mais une seule

    Nous devons regarder profondément pour voir et comprendre les besoins, les aspirations et les souffrances de la personne que l’on aime.

    De temps en temps asseyez-vous à côté de la personne que vous aimez, tenez sa main et demandez : « chéri(e), est-ce je te comprends assez ? Ou bien est-ce que je te fais souffrir ? S’il te plaît, dis-moi, afin que je puisse t’aimer comme il faut. »

    La vraie force n’est pas dans le pouvoir, l’argent ou les armes, mais dans une paix profonde et intérieure

    Méditer c’est regarder profondément dans les choses et voir comment nous pouvons transformer notre situation. Transformer notre situation c’est aussi transformer nos esprits [nos regards] et réciproquement : transformer nos esprits c’est transformer la situation parce que l’esprit est la situation et la situation l’esprit.

    Pourtant chaque année nous nous sommes pris en défaut. Noëlle a eu régulièrement des crises de dépression qu’elle savait habilement masquer. Il m’a fallu régulièrement la durée d’un mois pour découvrir la monté de la crise. Dès que nos deux regards la dévisageaient, la dépression perdait pied dans la conquête de son cerveau et la crise s’estompait en quelques heures. Seulement en mai 2015, la crise fut fulgurante et sidérante. Je fus paniqué, ce qui revint à perdre quelques jours cette paix profonde et intérieure qui m’habite depuis notre rencontre. Après la crise sidérante, trois longues journées furent nécessaires pour arriver à décoloniser l’emprise de son cerveau par la dépression. Méditer a été un chemin important et efficace pour maîtriser et réguler les débordements de cette maladie, ce type de dépression chronique installée depuis plus de 20 ans.

    Ceci dit, ces paroles nous ont principalement permis d’inventer pour chacun de nous une belle façon de vivre ensemble, de nous aimer profondément, librement et sans attachement, chacun étant d’abord en soucis du bonheur et de la joie de vivre de l’autre. Certes beaucoup de choses nous séparaient. Nous étions très différents mais aussi très complémentaires. Certes nous étions très amoureux depuis le départ et nous nous sommes profondément aimés. Cependant ce qui reste mystère et qui nous a toujours étonné au vu de nos parcours de vie si différents, c’est ce qui a nourri quotidiennement notre rencontre. La facilité de vivre chaque instant, être quasiment et spontanément d’accord pour faire quelques pas dans la rue, voir tel film, inviter tels amis…Des le départ ce fut une évidence et un sentiment étrange, comme si nous avions toujours vécu ensemble. Nos pas se sont immédiatement synchronisés pour notre plus grand bonheur.

    Ces textes semblent s’inscrire dans quatre valeurs fondamentales pour moi que sont l’exigence esthétique de la vie (la beauté), le besoin de dignité (la morale), le respect de la règle et de l’équité ( la justice) et enfin l’éthique de la joie de vivre chaque instant présent

    Jean Claude

  20. Avatar de desideriusminimus
    desideriusminimus

    Bonjour,
    Merci pour votre bel article, que je découvre avec bien du retard.

    L’expérience de plusieurs deuils qui a nourri ma réflexion fait que je partage entièrement votre point de vue.
    Je l’avais exprimé il y a trois ans sur mon blog (qui n’intégrait donc pas l’évolution récente de la loi Claeys-Léonetti):
    http://desideriusminimus.blog.lemonde.fr/2014/02/18/fin-de-vie-et-finitude-du-droit-a-propos-de-leuthanasie-du-suicide-assiste-et-du-consentement/

    Je regrette cependant que vous ne distinguiez pas suffisamment euthanasie et suicide assisté, car la première ne suppose pas nécessairement le consentement, ce qui peut hélas ouvrir la porte à bien des dérives (cf. le « cas Bonnemaison », dont il est aussi question sur mon blog:
    http://desideriusminimus.blog.lemonde.fr/2014/06/26/passion-raison-demagogie-et-droit-a-propos-de-lacquittement-du-docteur-bonnemaison/ ).

    Mais encore un grand merci pour ces textes si imprégnés d’humanité et de compassion.
    Très cordialement,

    Desideriusminimus

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Merci Desiderius de votre approbation, votre commentaire tombe à pic, j’ai prononcé hier soir jeudi une conférence devant des médecins (« Jeudis de Belledonne » à Grenoble concernant ces questions), et je m’apprête à poster sur ce blog un troisième article pour faire le point sur la nouvelle loi, que nous discutions hier. Et j’irai voir aussi votre blog. Cordialement

  21. Avatar de desideriusminimus
    desideriusminimus

    Merci beaucoup. Je suis très honoré !
    Cordialement,

    Desideriusminimus

  22. Avatar de Frédéric
    Frédéric

    Bonjour

    j’ai beaucoup apprécié votre article. je adhérent de l’ADMD

    pouvez vous me donner la façon de se procurer le produit cité

    Très cordialement

    Frédéric

  23. Avatar de Lolo38b
    Lolo38b

    Bonjour,
    Je tombe sur votre blog ce soir.
    Après maintes tentatives et efforts et essais de procédure avec psychiatres et autres médecins, je n’ai pas eu la possibilité de choisir, comme vous avez pu le faire, la manière dont je souhaite partir.
    Je peux peut-être vous expliquer mes motivations en privé. Je souhaiterais me procurer du nembutal. Je suis passée par d’autres voies mais évidemment je me suis retrouvée à perdre de l’argent et des gens mal intentionnés. J’ai contacté Dignitas mais les procédures sont extrêmement longues et désespérantes.
    Puis-je vous adresser en privé mes coordonnées ?
    En vous remerciant pour ce beau témoignage…
    LB

  24. Avatar de Lolo38b
    Lolo38b

    Je suis en Isère également.
    Vous êtes d’Herbeys ?
    La coïncidence voulant que j’avais une amie très proche partie il y a 10 ans d’une longue maladie habitant à Herbeys…
    Voici mon mail : lolo38b@gmx.fr

  25. Avatar de Lolo38b
    Lolo38b

    Bonsoir Daniel,
    Je ne suis pas une habituée des blogs er ne sais pas trop comment cela fonctionne.
    J’ai envoyé des commentaires qui me semble-t-il ont été validés mais je n’en suis même pas sûre.
    Y a t il un endroit où l’on peut vous envoyer un mail par exemple ?
    Bien cordialement

  26. Avatar de Psy
    Psy

    Je voulais vous témoigner de ma reconnaissance pour votre contribution sur ce sujet essentiel. Il faut aider nos malades désespérés à se réapproprier, comme ils le souhaitent, leur mort, lorsque cela est possible. Je ne vois pas comment il peut y avoir de progrès dans notre civilisation, tant qu’on détournera les yeux des mourants et de leur agonie. Non, on ne peut pas soulager toutes les douleurs, en l’état actuel de la médecine, et c’est une situation qu’il faut affronter.
    Merci mille fois pour votre belle contribution, et j’envoie mes pensées respectueuses à votre épouse.

  27. Avatar de Geneviève
    Geneviève

    Bonjour Monsieur, dimanche dernier à 20h30, l’émission « C Politique, la suite » abordait le problème de « la fin de vie ». En discutant avec une amie, elle m’a conseillé d’aller sur votre blog.

    Vos deux articles de 2016 sur le problème moral de l’euthanasie m’ont vivement intéressée, profondément touchée et je poste un commentaire. En effet vous terminez votre premier article en évoquant « l’hypocrisie qui entoure le libre accès de chacun à sa propre mort ». Je la déplore aussi depuis longtemps, mais plus encore depuis 2010.
    J’ai toujours pensé que l’homme ne sera libre que le jour où il pourra choisir l’heure de sa mort, s’il n’a pas perdu la vie accidentellement avant de vouloir faire ce choix. Depuis la création de l’ADMD en 1980 puis celle d’autres associations, nombre de philosophes, écrivains, cinéastes, médecins, hommes politiques ou simples citoyens comme moi ont cherché à « faire avancer le débat », comme on dit !. Tout cela en vain, force est de le constater, quand on lit tous les commentaires haineux qui vous ont été adressés après votre article sur Vincent Lambert.
    Dans une émission diffusée le 23 mai 2018, à une heure de grande écoute (20h55) sur France 5, intitulée : « Fin de vie, le dernier exil », on a pourtant vu le Dr. Senet montrer à un patient, comment se procurer sur internet les 15g de pentobarbital nécessaires pour s’endormir doucement et sans souffrance (sans donner bien sûr l’adresse mail).
    Mais l’autre soir on s’en est tenu à une déclaration de M.Roméro, disant son espoir de « voir enfin les choses avancer, car il avait été invité à dîner par M.Macron ! » et une intervention de Mme Noêlle Châtelet, pour rappeler le message de sa mère Mme Jospin : « ma fille, ma génération s’est battue pour obtenir l’IVG, la tienne devra se battre pour obtenir l’IVV (interruption volontaire de vie) et vous gagnerez» puis dire qu’elle était sur ce plateau pour gagner. Elle s’est ensuite alarmée du nombre croissant de suicides violents de vieux. Hélas aucune suggestion pratique de ces personnalités, qui de par leur notoriété, ont l’oreille du pouvoir. Et c’est là que je vous rejoins sur l’hypocrisie : tous ces gens, journaliste compris (j’espère ) ne peuvent pas ignorer la facilité maintenant de se procurer le produit létal permettant une mort douce. En haut lieu, cela se sait mais ne se dit pas, et tous, jeunes ou vieux, malades ou pas, en phase terminale ou pas, continuent à mal mourir en France. On en sera toujours au même point dans dix, vingt, trente ans…, si l’on s’en tient à d’âpres débats entre les pro-euthanasie, les anti-euthanasies et les pro-suicide assisté. J’ai moi-même milité pendant quelques années au sein de Ultime Liberté au début de sa création, pour le suicide assisté. Je préfère maintenant la notion de suicide accompagné. Rares sont les personnes acceptant de parler de la mort, plus rares encore, celles souhaitant la maîtriser. C’est une position antinomique de celle de l’assistanat. En revanche, certaines peuvent souhaiter pouvoir donner la main à un(e) ami(e), le moment venu pour elles de passer de l’état de vivant à celui de mort.
    Je pense donc que la seule solution serait d’obtenir une sorte de « droit à mourir », à priori très paradoxal puisque la mort est notre seule certitude depuis notre naissance ! ( je m’oppose ici à M.Leonetti qui prétend « qu’il n’existe pas de droit à la mort comme il existe un droit à la vie » en faisant remarquer que personne ne demande à naître!). Il est essentiel de faire comprendre que chacun d’entre nous est la seule personne à pouvoir dire si sa vie vaut pour elle d’être encore vécue et non pas est digne d’être vécue. A titre personnel, je refuse de devoir demander à quiconque la permission de mourir. Mais donner à celui qui le veut la possibilité de le faire sereinement n’oblige en rien ceux qui ne le demandent pas.
    Pour cela, j’aimerais que la France soit le premier pays à ouvrir des maisons de la mort douce. Ce serait des lieux publics, où toute personne majeure pourrait se procurer une dose de produit létal, sans avoir à se justifier. Le fonctionnaire chargé de la délivrer, reconnu dans ses responsabilités officielles (nouveau métier à créer que l’on pourrait appeler thanatologue) devrait simplement s’assurer que le demandeur exprime bien une décision mûrement réfléchie. A cette fin ce dernier devrait réitérer plusieurs fois sa demande, le délai entre ses demandes variant de quelques minutes à plusieurs mois selon la situation d’urgence ou pas. Dans son devoir de protection des plus faibles, la société doit en effet s’assurer que les demandeurs ne traversent pas un moment difficile ou ne sont pas, en ce qui concerne les personnes âgées, poussées par des proches avides de l’héritage. On évitera ainsi nombre de suicides impulsifs, de jeunes en particulier, ou de suicides prématurés de personnes âgées, craignant ensuite de ne pouvoir le faire. Il faudra bien sûr prévoir un transfert de responsabilité à un soignant dans le cas de personnes n’étant plus en état de boire, et statuer sur le problème d’enfants mineurs atteints de maladies incurables. Tout cela n’est que détail et relève du domaine du juriste. L’important est, de mon point de vue, qu’en Occident, le sujet de la mort ne soit plus tabou et que le regard sur notre mort change. Cela devra s’accompagner d’une formation de tous les enseignants afin que, dès leur plus jeune âge, tous les enfants abordent ce sujet posément et puissent considérer la mort non comme une calamité effrayante qu’il faut taire, mais comme l’aboutissement normal et inéluctable de toute une vie.
    Monsieur, si mon commentaire retient votre attention, je serais honorée de pouvoir échanger avec vous, dans l’espoir que vous puissiez par la suite user de votre position de professeur émérite et d’écrivain, pour vous faire l’avocat du projet de société, plus adulte et plus responsable, dont je rêve depuis si longtemps… Par avance merci. Très cordialement. Geneviève

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      A lire votre « commentaire » si soucieux d’améliorer l’humaine condition, qui passe j’en suis intimement d’accord avec vous par le droit de mourir selon son propre choix (quand le choix est possible), je mesure une fois de plus l’arriération des commentaires en effet haineux soulevés par mon premier billet sur Vincent Lambert : comme nous sommes loin de cela ! Que le chemin sera long ! Mais raison de plus en effet pour militer dans ce sens, pour peser sur nos décideurs, par les moyens disponibles, dont ce blog fait partie. Merci à vous, Geneviève ! Je vais vous écrire sur votre adresse mail.

  28. Avatar de Kelle
    Kelle

    Je découvre vos réflexions qui me bouleversent après la perte de ma mère. Pendant 10 ans elle s est battue et a accepter de subir les divers traitements plus durs les uns que les autres. La dernière année a été terrible, et je suis hantée par ses regards quand au fil des jours elle se voyait perdre sa dignité de rester celle qu elle était jusqu au bout. Je n ai pas su l aider à partir dignement. Je voudrai savoir comment se procurer ces produits parce que je ne veux plus revivre cette impuissance dans le cas où.

  29. Avatar de Alex
    Alex

    Bonjour Daniel, je suis tellement touchée par votre article. Serait-il possible de dialoguer par mail? Je vous remercie d’avance.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Oui, je vous écris ce mercredi ! (Je viens de passer plusieurs jours sans internet)

  30. Avatar de Raphaël
    Raphaël

    Bonjour Mr. Bougnoux,
    Je suis paraplégique depuis 26 ans, dans un état très dégradé, et subissant désormais une infection de la colonne vertébrale incurable. Je travaille sur ma fin de vie depuis quelques années, elle est officialisée depuis 1 an, encadrée médicalement. Je commence désormais à contacter des personnes qui s’intéressent à cette thématique, particuliers, associations.
    Est-ce que l’on pourrait s’entretenir par mail ?

    Bonne journée !

  31. Avatar de Anne
    Anne

    Bonjour,
    J’aimerais discuter avec vous par mail. J’aimerais savoir comment se procurer le produit miracle pour le jour où vraiment je n’en pourrai plus (je suis vraiment à bout depuis longtemps déjà, j’essaie encore de m’accrocher un peu pour l’instant).
    Cordialement

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À propos de ce blog

  • Ce blog pour y consigner mes impressions de lecteur, de spectateur et de « citoyen concerné ». Souvent ému par des œuvres ou des auteurs qui passent inaperçus, ou que j’aurai plaisir à défendre ; assez souvent aussi indigné par le bruit médiatique entretenu autour d’œuvres médiocres, ou de baudruches que je…

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À propos de l’auteur

  • Daniel Bougnoux, professeur émérite à l’Université Stendhal de Grenoble, est ancien élève de l’ENS et agrégé de philosophie. Il a enseigné la littérature, puis les sciences de la communication, disciplines dans lesquelles il a publié une douzaine d’ouvrages.

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