Un amour sans histoire

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Je n’avais pas d’opinion arrêtée sur François Bégaudeau, dont le dernier roman, ambitieusement intitulé L’Amour, avait été distingué au Masque et la plume comme un des chefs d’œuvre de la rentrée. Le texte ne comptant que quatre-vingt dix pages, je me le suis donc procuré, hameçonné aussi par son incipit (que les critiques ne semblent pas avoir remarqué), « La première fois que Jeanne voit Pietro (…) ».

Comment ne pas songer à Aurélien d’Aragon, « La première fois qu’Aurélien vit Bérénice (…) », qui ouvre les sept-cents pages d’une des histoires d’amour les plus bouleversantes que je connaisse, que j’ai dû lire dix fois (dont une sur manuscrit pour en assurer l’édition dans la Pléiade), qui m’a d’une certaine manière éduqué sentimentalement, autant que littérairement, pour son entrelacs de dits et de non-dits, de hantises et de peurs, d’analyses magistrales et d’insidieuses suggestions ?… Nous sommes nombreux je crois à avoir appris à lire, et à aimer, dans Aurélien qu’Aragon prit le temps d’écrire au cours de la dernière guerre, comme si cette sinueuse rêverie d’un bourgeois désoeuvré, et d’une provinciale trop fière, pouvait le distraire des combats de la Résistance (et des injonctions d’un réalisme socialiste que ce foisonnant roman ignore superbement).

Confronté à ce modèle pour moi assez haut placé, L’Amour de Bégaudeau, prenant le contre-pied d’Aurélien, procède par soustraction : pas d’analyses ni de péripéties psychologiques, pas de drame à proprement parler, aucune échappée lyrique ou, à tout le moins, imaginative, les deux personnages, Jeanne et Jacques Moreau ne se racontant pas d’histoires, ne se faisant aucun cinéma (malgré le nom de la protagoniste !).

On pourrait ajouter : pas d’intériorité, nous ne connaissons ces deux époux que de l’extérieur, par leurs routines, par les choix que leur dictent la radio ou les magazines d’une consommation bon marché. Par les loisirs de professions médiocres, lui jardinier, elle sténo-dactylo. Comme ils semblent prévisibles, donc inintéressants ! Et c’est là que réside le tour de force : cette peinture ordinaire de gens ordinaires, d’un « amour tel qu’il est vécu la plupart du temps par la plupart des gens : sans crise ni événement. Au gré de la vie qui passe, des printemps qui reviennent et repartent. Dans la mélancolie des choses. Il est partout et nulle part. Il est dans le temps même » (précise l’auteur en quatrième de couverture).

Ce temps même, on s’en doute, n’est pas celui de Proust mais, plus proche de nous, la durée des vies ici déroulées toucherait davantage à ce que voulut faire Annie Ernaux dans Les Années : l’autobiographie de nos Trente glorieuses (et après) par la voie ou le matériau des choses, comme la fin de la 2CV et l’arrivée du camping-car, l’apparition de la mini-jupe, ou à la radio le passage de Piaf aux tubes de Starmania… Toutes nos vies sont ainsi ponctuées, scandées par cet accompagnement ou ce cadre prévenant, accueillant de ce que Perec aussi appelait les choses, qui n’ont l’air de rien et dont nous croyons disposer alors qu’elles nous gouvernent…

On dira ce roman trivial, et c’est en effet essentiel : fixer la trivialité, la condition commune de ces gens qui n’accèdent pas, aux deux sens du terme, à la représentation : on n’en fait pas des porte-parole, encore moins des héros de cinéma ou de roman, tandis qu’eux-mêmes conscients de leurs limites, de l’espace qui leur est chichement concédé, se mettent à peine en scène, et n’accèdent qu’à peine à une conscience de surplomb, à une parole qui les qualifie ou les éclaire… Les saisons s’enchaînent, comme font les objets et les générations. Et c’est poignant, pourquoi ?

J’ai failli pleurer en terminant ce roman, si bien nommé « l’amour » dont il peint les ressources ordinaires, les attaches indicibles ; pas de reproches ici ni de grandes déclarations, pas de coups (de théâtre, de cœur) mais le cadeau d’une tarte aux pommes, la transmission d’une pendulette… Comment hiérarchiser sous la grisaille apparente des jours les ressources ou (Giono) « les vraies richesses », comment préciser de quoi une vie se nourrit ? S’ils n’exécutent rien de notable, ces gens pour autant ne font pas rien, et le talent de Bégaudeau est de nous montrer, de nous faire toucher ce tissu interstitiel des jours, ces liens peu visibles, mais tellement forts… La douce obstination de vivre, de suivre son chemin ; trivial en effet puisque ce mot désigne la voie, le carrefour ou l’inflexion d’une bifurcation, ce qui nous conduit et où chacun à son tour piétine, le commun que nous partageons sans le remarquer clairement, l’humus ou le sol sous-jacent qui fait l’humanité.

Il faut beaucoup de retenue, de sagacité, de piété pour écrire à ce niveau-là. Bégaudeau ne nous illumine pas, il ne veut pas étonner, il ne claironne rien ; juste nous rappeler ce trivial qui nous étreint, cet infra-ordinaire où nous nous trouvons pris.

 

François Bégaudeau, L’Amour, éditions Verticales 14,50 €.

7 réponses à “Un amour sans histoire”

  1. Avatar de Roxane
    Roxane

    Bonjour amis bien endentés ou non !

    Voici un nouveau livre écrit par un jeune homme riche qui nous parle du fleuve « Amour » qui traverse, tranquille, la vie des gens sans qualités. Il fallait bien, un jour ou l’autre, entrer dans l’intimité de ces gens qui ne roulent pas sur l’or, les gens d’en bas, comme ils disent. Une vie de routine, chez ces gens-là, où l’on peut « s’aimer », quand même, nonobstant les obstacles. Trivial, dit-il, dites-vous…Du latin trivium = trois voies, si l’on s’arrête à l’étymologie du mot. Revenons à son sens commun, à cette vie ordinaire, infra-ordinaire, écrit pertinemment le randonneur.

    Entre les courses au supermarché, la visite chez le médecin, et la facture à payer chez le garagiste, les Jacques et Jeanne de la dolce France ne dédaignent pas la littérature mais ils ont autre chose à faire. Faire tourner la boutique, ça passe avant Aurélien et les émissions de France-culture, n’est-ce pas? J’ai regardé les lettres du mot « trivial » et en les transposant on peut faire « vitrail ». Comment ne point penser à cette chute d’un poème de José-Maria de Heredia ? – :

    « Ils gisent là sans voix, sans geste et sans ouïe,
    Et de leurs yeux de pierre ils regardent sans voir
    La rose du vitrail toujours épanouie. »

    Que sait-il de cette « insolente rivière », notre jeune homme riche qui fait et vend des livres ?

    Assez de choses sans doute, pour nous aider ici-bas, en ce monde devenu stone, à suivre sa vallée, telle la rivière, pour aller quelque part, ailleurs sans doute, là où réside la vraie vie.

    Chez le physicien citant Spinoza, il y a aussi le mot « Amour » dans sa recherche du réel.

    Un livre, encore un livre…Est-ce suffisant pour aider les pauvres gens à sortir de la mouise, autrement dit à ne pas se laisser aller, résister quand même aux choses en se méfiant du « clou de satin » qui a dans ses lettres « la séduction » ? Sans doute faut-il du temps pour apprendre à « aimer »…et à se sortir de la foule sentimentale. En d’autres termes à s’aider… Retenir la leçon de la fable du jardinier et son seigneur (Livre IV, 4) pour conserver au moins, son potager.

    Et dans sa ronde ailée, aller revoir la « Madeleine » sur les bords du lac inconnu, avec et sans « Amour » du jeune homme riche qui a lu Proust.

    Peut-être, un jour couleur d’orange, le verra-t-on ce jeune homme à la bouche d’opéra, lancer son appel à la résistance, s’envoler pour « lancer ce futur »(1) sur notre « Radio Londres », la chaîne privée de télévision française, autrement dit « la 16 » des gens simples, silencieux, de la France profonde, attachés encore à certaines valeurs sûres…qui regardent de temps en temps, la télé.

    Sacré programme ! A vérifier sur le magazine, le jour et l’heure…

    Plaise au ciel que Jeanne et Jacques soient avertis à temps !

    Roxane

    (1) « Lancer ce futur » est l’anagramme de « France-culture », une radio que je n’écoute jamais.

    Tout bêtement parce que le poste est au grenier et qu’il ne fonctionne plus depuis belle lurette,

    palsambleu !

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Je peine à vous suivre, Roxane, dans le labyrinthe de vos associations !… J’ai surtout voulu, dans ce court billet, saluer l’entreprise singulière d’un auteur qui parle d’amour (sentiment exaltant propice aux déclarations, aux déclamations) de façon apparemment si plate, si peu lyrique, et pourtant capable de nous toucher infiniment… Je suis curieux de connaître l’impact ou les ventes de ce livre, bien fait pour susciter une large adhésion.

  2. Avatar de Jacques
    Jacques

    Bonjour !

    Un temps pluvieux, ici, qui incite plutôt à prendre la plume au lieu d’aller, de ce pas, ramasser des châtaignes.

    Quel beau et bon billet, en effet ! Un bain de jouvence dans la vie toute simple des gens simples.

    Je n’ai pas encore lu ce livre de Monsieur François Bégaudeau. Je l’ai simplement vu et entendu pendant une bonne heure nous en parler. Tout compte fait la simplicité n’exclut pas la complexité et c’est dans ce paradoxe où s’aventure notre auteur.

    Comment ne point penser à cet autre écrivain (et non écrivaine), Mme Danièle Sallenave, citant la vibrante admonestation de Jules Michelet dans son « Histoire de la révolution française » qui en appelle aux « gens d’en bas » pour apporter aux « hommes d’études » ce qu’ils ne possèdent pas toujours ?

    Je suis tenté de paraphraser Michel Serres, lu dans « L’Hermaphrodite » : « Avez-vous rencontré sur la route de Paris, un Jacques et une Jeanne, jardinier et sténo-dactylo, montant sur la capitale pour écrire un livre sur la vie intime de leurs observateurs chevronnés ? »

    Imaginez telle question posée à notre si sympathique et jovial écrivain, l’autre jour, avant la séance des dédicaces !

    Sans nulle conteste, il aurait aimé. Mais c’est une fiction et rien ne change sous le soleil où le maître des horloges supplante le maître de la grammaire, nous dit encore Mme Sallenave, citant Condillac.

    Ce matin, branché sur une chaîne de télévision, j’écoutais un futur sénateur de Paris, aujourd’hui encore maire d’un arrondissement, proposant une idée pour protéger ses administrés. J’avais sous les yeux la lettre qu’il a envoyée, un jour, à M.Régis Debray pour lui demander son avis sur diverses questions concernant une affaire criminelle. La réponse du destinataire date du 4 juin 2004. Monsieur Bougnoux connaît le contenu de cette correspondance, puisqu’il était membre du comité de lecture de la revue qui l’a publiée.

    Digression, pensez-vous? Sûrement pas. Déjanté, ce propos? Alors retournez à vos chères études sans oublier d’aller refaire un tour du côté de chez Jeanne et Jacques, avec une fine loupe, au sein même de la gent populaire, qui ne se laisse pas monter sur les pieds. Une fine loupe n’est pas une « simple loupe » contenant en ses lettres « le populisme ».

    Vous m’en direz des nouvelles !

    Jacques

    P.-S : Le commentaire de Mme Roxane est simplement complexe. J’eusse aimé qu’elle nous éclairât sur cet itinéraire où, tous unis vers Cythère, on serait censé par la rhapsodie d’un maître, atteindre « l’ailleurs » où la vraie vie se confine.

  3. Avatar de Jean Claude
    Jean Claude

    Merci Daniel pour cette belle découverte, un récit sobre sans fioritures. J’avais déjà rencontré l’auteur dans “Entre les murs” film de L Cantet. Ce jeune homme riche, comme l’écrit Roxane l’est surtout par le fond d’humanité qu’il sait magistralement explorer et la forme de son écriture.

    La sobriété de son écriture, fond et forme le rapproche de Annie Ernaux certes, mais cette dernière me semble plus sociologue abordant la grande histoire à travers son vécu personnel. Je rapproche davantage F Bégaudeau de Maria Pourchet “ le feu” et aussi “Western”. il y a encore dans la même veine “Triste tigre” de Neige Sonno. Ou encore le film “les feuilles mortes” de A Kaurismaki.

    La vie au quotidien, sans fioriture ni passion ni ambition. La vie des petites gens. Dans “Western” un grand comédien déchu redevient “une petite gent”. Si Western et encore plus “Triste tigre” cru et traumatique pour le lecteur, abordent la face sordide des rapports humains ou les amours tristes, F Bégaudeau se cantonne au vécu simple et sans histoire d’une vie de couple sans passion.

    C’est tout le contraire de ce que partage Léonor de Récondo dans “Le grand feu” roman de passion exaltée et nourri de la passion musicale professionnelle de l’auteur.

    Découvrir ces différentes œuvres en quelques semaines questionne mon rapport à l’amour à la vie et aux passions. Une de mes passions, celle de gravir les cimes par exemple. Aujourd’hui, vivant à Coursegoules dans ce petit village, à 75 ans, la sobriété prend le dessus. Au coin du feu, par ces temps qui rafraîchissent ces derniers jours, je peux contempler en regardant YouTub, les parois que j’ai gravies et autres randonnées en toute saison. C’était un autre temps, une autre vie. C’est très étonnant ce pouvoir numérique, pouvoir se regarder vivre avant ! Mon père n’a pas pu en bénéficier.

    Aujourd’hui la sobriété, le besoin de simplicité prennent le dessus. Cheminer en nature comme en culture, oui, mais doucement avec un autre regard. Je comprends ainsi que cette vie simple peut rendre pleinement heureux. Prendre de l’âge n’est pas vieillir c’est-à-dire ne plus avoir de projet. C’est au contraire garder l’appétit de vie, sans nostalgie. Et je me retrouve ainsi beaucoup en résonance dans le roman de F Bégaudeau.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Oui Jean-Claude, le « roman » apparemment sans histoire(s) de Bégaudeau touche en nous des couches profondes… Et constitue ben le tracé d’une ou de deux vies. J’essaierai de revenir à ça, écrire la vie, quand je rendrai compte ici du livre de François Jullien « La transparence du matin » dont je termine actuellement une troisième lecture…

  4. Avatar de Gerard
    Gerard

    Bonjour !

    Merci Monsieur Jean-Claude pour ce commentaire qui nous parle de « petite gent ».

    Je l’ai lu et relu avec plaisir dimanche soir, de retour d’un salon du livre dans un département voisin.

    Ce dimanche matin là, de bonne heure, je reçois un message d’un ami. Il s’appelle Abdallah, s’intéresse aux sciences expérimentales et à Gaston Bachelard. Les voies du Seigneur sont impénétrables, se plaît-il à m’écrire…

    Et me voici là-bas où, dans la salle Boris-Vian, sont assis une bonne vingtaine d’exposants avec leurs livres sur la table.

    L’organisateur est un agriculteur qui fait lui aussi des livres. La foule n’est pas au rendez-vous mais on fait avec…

    J’aurais voulu porter une étoile jaune pour me sentir solidaire avec la gent juive, dimanche dernier en tel lieu.

    Une discussion à bâtons rompus avec deux auteurs, gens instruits et plutôt fortunés qui font de grands voyages.

    Le courant ne passe pas, ne peut passer quand on met sur le même plan des choses inconciliables.

    Je prends parti, forcément, et l’autre, en face, de même. Nous ne sommes pas du même bord et chacun d’avancer ses pions pour des mots qui s’envolent et qui ne changent rien. Les filles de Sion s’en moquent et la petite fille de Gaza, aussi…

    Et pourtant, quelques fautes d’orthographe en ouvrant le livre de l’un, le livre de l’autre et, bifurquant un peu, d’étonnants hasards, telles des lucioles sur ce chemin d’obscurité, font d’une rencontre un émerveillement où l’on se découvre réjouis, ré-unis vers Cythère, à temps et à contretemps. Rencontre d’un autre type, sur un autre registre où la mémoire, la culture, la bénévolence et la chance en sont aussi pour quelque chose…Ni moulins à citations ni moulins à prières. Ailleurs, tout en étant sur place sans faire du surplace.

    Ce plus, ce quelque chose d’autre, comme autant de feuilles mortes qui se « ramassent à l’appel – celui de l’Être » pour revivre, s’envoler et résister loin, si loin du bruit et la fureur du monde. Et de penser, peut-être, au tréfonds de notre être, à cette parole de Daryush Shayegan, citant Parsifal « Seule guérit la blessure, l’arme qui la fit », loin de ces idéologues, y compris ceux que le contribuable entretient, non pas des penseurs critiques, mais des croisés qui vont sans relâche à la conquête des moulins à vent et ceci au détriment de ce bon sens qui, n’en déplaise à Descartes, est tout compte fait la chose la moins partagée du monde.

    On pense encore, sans digression aucune, à ce cher Gaston Bachelard, écrivant dans « L’air et les songes » , page 213 :

    « On ne saurait trop donner d’importance à ce caractère autoritaire de la rêverie qui se donne le plus gratuit des pouvoirs créateurs. Cette rêverie travaille par l’œil. Bien méditée, elle peut nous apporter des lumières sur les étroits rapports de la volonté et de l’imagination. Devant ce monde de formes changeantes, où la volonté de voir dépassant la passivité de la vision projette les êtres les plus simplifiés, le rêveur est maître et prophète. Il est le prophète de la minute. Il dit, d’un ton prophétique, ce qui se passe présentement sous ses yeux. Si, dans un coin du ciel, la matière désobéit, ailleurs d’autres nuages ont déjà préparé des ébauches que l’imagination-volonté va achever. Notre désir imaginaire s’attache à une forme imaginaire remplie d’une matière imaginaire. » (Fin de citation)

    Une occasion ici, dans ce petit local de braves gens honnêtes assis devant leurs livres, de ramasser des souvenirs sans en faire tout un cinéma, sans pour autant ignorer celui de M.Aki Kaurismäki que l’on peut aussi ne pas avoir vu.

    Et sur la route du retour, un arc-en-ciel.

    Pénates regagnés, devant l’écran, le commentaire haut en couleur et revivifiant du chemineau coursegoulois qui fait du bien au cœur et au corps. Et puis, à la télévision, le film de la soirée, vu et revu… Une sorte de « Liesse d’un fou » dont les douze lettres transposées font découvrir « Louis de Funès ». Quel rabbi dans les rues de France et de Navarre saura lever le voile et faire transparaître une autre réalité ?

    Le jeune homme riche des évangiles dont me parlait, un jour, dans une lettre, le Pr Henri Laborit, a du pain sur la planche…

    Gérard

  5. Avatar de Aurore
    Aurore

    Quel plaisir de vous lire, cher billettiste, chers commentateurs !

    Avec vous pas question de faire la grasse matinée, toujours à l’affût vous guettez le passage et sans nous obliger, vous nous invitez discrètement à suivre vos erres dans les halliers du vocabulaire.

    Oui, aller refaire un tour du côté d’un salon du livre en arborant l’étoile jaune, quelle bonne idée !

    En ce matin tout tranquille et serein, ici dans ma campagne désertée, je relis quelques phrases de Monsieur Jullien dans « La transparence du matin » :

    « Il y a tant d’aurores qui n’ont pas encore lui » (Aurore)

    « Mais, quand je dis l’ « enfin » de l’attente, voici qu »enfin » se retourne contre la fin, se dédit de lui-même, fait surgir de cet achèvement, un avènement.

    L’adverbe ne ferme pas, mais ouvre. Non pas le rideau tombe, mais il se lève : « aurore »- un nouvel horizon apparaît.

    Ce propos me fait rouvrir la dernière page de « L’existence amoureuse – La passion et la durée – » de Yves Prigent, où je lis :

    « Je ne me résigne pas à écrire le mot FIN (…) J ‘écrirai donc; je crierai vers l’avenir : VIENS ! »

    Dans Le temps retrouvé, M.Proust écrit « Car nous sentons que la vie est un peu plus compliquée qu’on ne dit, et même les circonstances. Et il y a une nécessité pressante à montrer cette complexité  » Est-ce par hasard si Edgar Morin dans « Science avec conscience » met cette citation en exergue ?

    Le commun des mortels qui déserte les salons du livre ne va pas écouter dans une salle parisienne Monsieur Jullien.

    Il a autre chose à faire dans sa vie de tous les jours…Pour lui, ça veut dire quoi, au juste, « Rouvrir des possibles » ?

    Dans ses livres qui nous parlent à nous, à vous qui lisez ce commentaire, on cherche la clé dans ce lac inconnu, cher à M.Proust; « ce blanc inconnu sous clé stricte » dont nous connaissons le sens par ses lettres transposées, n’est-ce pas ?

    Proust et Freud. Monsieur Jean-Yves Tadié qui ne connaissait pas l’anagramme, en appelle à ces deux attitudes, à ces deux pôles de la métaphore, espérant faire jaillir une étincelle, une idée, une impression poétique. Ainsi, se souvenir de l’un quand l’autre parle.

    Belle référence, en effet !Sacrée culture…Applaudissez l’artiste Mesdames et Messieurs !

    Oui mais, ils s’en fichent les gens de la thèse sur » La recherche du temps perdu » du beau jeune homme, fin, intelligent, (thèse dirigée par Monsieur Tadié) devenu maintenant notre grand argentier.

    Ce qui les intéresse, c’est le prix du fuel à la pompe, mon neveu ! Autrement dit la fin du mois.

    Quid alors de la fin du monde ? « La fin du monde est pour demain », lance-t-on partout, à la cantonade.

    Pourquoi faut-il que cette expression d’un tableau de J.Bosch devînt par une belle anagramme un

    « Arôme fou d’un matin splendide » ?

    Répondez, bonnes gens instruits qui écrivez des livres, qui parlez dans nos écrans et qui suivez Stella, signe en latin, dans votre randonnée inachevée !

    Je viens de rouvrir une pièce de théâtre où je lis finalement :

     » – Comme cela s’appelle t-il, quand le jour se lève comme aujourd’hui, et que tout est gâché, que tout est saccagé, et que l’air pourtant se respire, et qu’on a tout perdu, que la ville brûle, que les innocents s’entre-tuent, mais que les coupables agonisent dans un coin du jour qui se lève ?

    – Demande au mendiant. Il le sait, dit Electre.

    Icelui de lui répondre que cela a un très beau nom.

    Aurore

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À propos de ce blog

  • Ce blog pour y consigner mes impressions de lecteur, de spectateur et de « citoyen concerné ». Souvent ému par des œuvres ou des auteurs qui passent inaperçus, ou que j’aurai plaisir à défendre ; assez souvent aussi indigné par le bruit médiatique entretenu autour d’œuvres médiocres, ou de baudruches que je…

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À propos de l’auteur

  • Daniel Bougnoux, professeur émérite à l’Université Stendhal de Grenoble, est ancien élève de l’ENS et agrégé de philosophie. Il a enseigné la littérature, puis les sciences de la communication, disciplines dans lesquelles il a publié une douzaine d’ouvrages.

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