Suite du roman « L’Inensevelie », qui comptera douze livraisons.
III
Et le téléphone a beau bourdonner, rien, toujours rien. « Elle reviendra à la Toussaint », prophétisait leur père. Novembre est maintenant largement entamé. Un sentiment d’irréalité domine ces journées d’attente et de supputations, on savait sans vouloir savoir, on se jetait en pâture des bribes d’explication, chacun y allant de ses souvenirs, de ses hantises ou de ses conjurations. C’était le temps bizarre des hypothèses, ou de la croyance.
Le point fort de l’argumentation de Jean-Louis, ce sont les chèques. Yvette a emporté son chéquier et son livret d’épargne. Comme l’un et l’autre comptes sont à son seul nom, la banque refuse de communiquer aucune information sur les opérations qu’elle peut faire. Par contre, les relevés arrivent à la maison. On a su de la sorte qu’en date du 2 ou 3 elle avait tiré deux chèques d’environ trois cents francs chacun. « Cela correspond assez bien à une note d’hôtel », souligne le père qui pense par ce moyen la suivre à la trace. Les relevés étant mensuels, il a fallu attendre novembre pour découvrir qu’entre temps les comptes n’avaient pas bougé. « – Pourtant elle a commencé par tirer de l’argent, par se rendre quelque part », argumente-t-il auprès de Pierre. « – Es-tu sûr des dates ? Est-ce que tu ne confonds pas la date de signature des chèques et celle de la valeur ? » Renseignements pris, les chèques ont été émis antérieurement au 30 septembre. Si Yvette voyage, elle dépense donc de l’argent liquide.
Ici se présente l’hypothèse du coffre. Les frères apprennent qu’il en existe un, scellé dans un mur du salon, et dont leur mère avait ce jour-là l’unique clef. Or cette clef, leur père aidé de la femme de ménage a pour la retrouver retourné la maison dans ses moindres recoins. Il faut donc qu’elle l’ait emportée avec elle, après avoir prélevé ce qu’il lui fallait de liquidités. Puisque la clef reste introuvable, qu’on force la serrure pour savoir ce qu’elle a pu prendre ! Ils attendront plusieurs semaines pour que leur père se décide à appeler l’artisan compétent. L’épreuve pourtant est cruciale, s’il se révèle qu’Yvette est partie sans argent, sa probabilité de survie avoisine zéro. Il apparaît le quinze novembre que le contenu du coffre, ouvert au chalumeau, est demeuré intact.
Qu’en pense la police ? Naturellement la disparition lui a été signalée dans les premiers jours, une fois épuisés par téléphone tous les points de chute envisageables, famille, amis. (Yvette n’en comptait pas beaucoup, le tour a été vite fait, mais cela sema un bel étonnement et délia quelques langues, « – Allô, ici Jean-Louis, vous n’auriez pas vu Yvette par hasard ?… ») Eh bien la police ne peut rien faire, la personne est adulte, elle a le droit de voyager. Un avis de recherche ? Non, seulement pour les disparitions de mineurs. Et savez-vous combien de personnes « disparaissent » chaque année en France ? Autour de dix mille, un peu moins que de morts sur les routes. Alors, si la police devait se mettre à courir après tous ces gens-là… Le cas du monsieur qui, sorti acheter son journal au coin de la rue, n’est jamais revenu n’est pas extrardinaire mais plutôt banal. On file pour toutes sortes de raisons, dettes, imbroglio conjugal, escroquerie aux assurances-vie ou simple désir de se refaire ailleurs, de remettre le compteur à zéro, ce ne sont pas les occasions qui manquent, on se change en courant d’air et pfuitt…, bonsoir !
Pourtant, en communiquant directement avec le commissariat, Christophe a senti qu’on y prenait l’affaire au sérieux. Il y a eu des contrôles auprès des hopitaux sur le chemin qu’aurait pu emprunter Madame Argimbault, le numéro de sa R5 grise a été inscrit au fichier des voitures volées, et la même précaution a été prise pour les numéros de son chéquier. Mais le commissaire semble attendre que la situation soit mûre, quelques semaines de disparition c’est encore la durée d’une fugue. Il a aussi convoqué le docteur à plusieurs reprises, et a dû lui poser quelques questions gênantes car au téléphone du soir Jean-Louis était ulcéré, sa femme il ne l’a tout de même pas enterrée dans le jardin !
Et pourquoi pas ? demande Jeanne le plus sérieusement du monde. Christophe ne trouve pas tout de suite la réponse, l’hypothèse soulève un doute trop intime. Il sait son père violent, et comédien ; fin septembre, il a vu combien les rapports entre ses parents semblaient exaspérés. S’il y a eu dispute suivie de coups, on peut tout imaginer, qu’elle s’assomme en tombant, qu’il prenne peur, comme au cinéma quoi ! Tout de même… L’hypothèse ouvre la question du personnage joué par Jean-Louis, aurait-il la force, ou faut-il dire le talent de savoir à ce point mentir ? Au cours d’une de ses dernières conversations avec Christophe, Yvette avait eu ce mot, « ne crois pas ton père, il ne raconte que des mensonges. » « – Oui, rétorque Pierre à qui son frère rapporte par téléphone le propos, mais elle parlait de transactions financières où nous savons qu’il arrange en belles paroles des affaires assez piteuses. Enfin, s’il l’avait tuée, elle n’aurait pas laissé de lettre… – Oui mais cette lettre, justement, personne ne l’a vue ! – C’est vrai, c’est même curieux comme on n’arrive pas à savoir ce qu’elle dit exactement. Comme pour le coffre, il fait traîner. »
Tout de même… Ce qui ressort des palabres téléphoniques, c’est qu’il n’est pas pressé de la retrouver, mais qu’il ne sait pas où elle est. On dirait même qu’il s’est installé dans cette situation, qu’il en est – les trois frères ont la même impression – soulagé. Il se plaignait dans un premier temps de tracas purement matériels, son linge sale ou ses dîners à coups de tranche de jambon. Du sort de l’absente, pas un mot. Une autre personne a maintenant fait surface, « Je me disais, quand nous sommes rentrés hier soir… », quel est ce nous, petite bulle aussitôt évanouie dans le discours du célibataire ? Ses fils n’ont pas besoin qu’on leur fasse un dessin, leur mère peut disparaître, il se console avec Mademoiselle Guénégaud. Ils ont appris qu’à la Toussaint, quand il s’est rendu aux Chatoux, il avait installé celle-ci accompagnée de sa mère à l’Hôtel des Voyageurs de la proche commune. C’était un peu voyant dans ce coin de campagne, et les voisins ont jasé. En attendant le ton a changé, il devient menaçant, « Et quand elle rentrera tu m’entends, ce ne sera jamais plus comme avant, des coups pareils ça ne s’oublie pas ! ». Et puis leurs téléphones il commence à en avoir sa claque, est-ce qu’ils croient par hasard que si leur mère revenait il ne les préviendrait pas à la minute, que dis-je à la seconde de son retour ? Alors à partir de maintenant qu’on lui fiche la paix, c’est lui qui appellera.
Une qui se donne un mal fou, c’est Paule. Elle en tient depuis le début pour la thèse du voyage. Elle s’est souvenue avoir offert pour Noël à sa belle-mère un guide des gîtes de France, ou des vacances à la ferme, que celle-ci conservait dans sa voiture. Doù l’idée d’adresser à quelques deux cents gîtes ruraux la même lettre photocopiée, donnant le signalement d’Yvette et de sa R5, accompagnée d’une photographie en couleur, et demandant à ceux qui l’auraient vue de bien vouloir téléphoner d’urgence en PCV. Avec l’aide de Serge et de Pascale, Paule a profité des vacances de Toussaint pour expédier ce volumineux courrier. Les réponses n’ont pas traîné et Serge les communique fièrement à Pierre, leur mère est signalée en trois ou quatre endroits, on peut même reconstituer son itinéraire, qui passe du côté de La Rochelle, où elle était accompagnée d’une jeune fille (?), puis descend à travers le Périgord où l’on se rappelle très bien cette dame qui s’est arrêtée deux jours avec sa petite auto métallisée, on la remarquait à ses bijoux (??), Collioures enfin où on perd sa trace mais où une buraliste est formelle, c’est tout-à-fait le portrait de cette dame, si vous saviez comme elle nous a fait rire avec ses plaisanteries ! « Notre mère, faire rire ? A d’autres !… – Oui d’accord, plaide son frère, il y a des détails qui ne collent pas, les gens confondent un peu. Mais le visage mon vieux, et la voiture, ça ne les trompe pas. Que ça nous plaise ou non, maman fait actuellement un tour en Espagne, voilà… Parce que pour toi elle est morte, tu vois toujours le pire c’est ça ? – A quoi veux-tu croire d’autre ? » (Et Pierre se récite à lui-même, car Serge et lui n’ont pas forcément les mêmes lectures, Pourquoi toujours imaginer le pire ? Parce que c’est ressemblant. Signé Castille. Point à la ligne.)
Il est évidemment impossible de tenir à sa grand-mère ce langage. Non que celle-ci accorde grand crédit à la fable des gîtes ruraux. Sait-on d’ailleurs ce qu’elle pense vraiment ? Elle-même sans doute varie d’un jour à l’autre. Si les rapports de sa mère avec son père sont déjà difficiles à débrouiller, la génération antérieure est inatteignable et Pierre n’a jamais bien compris les relations entre la fille unique et sa mère. Il devine une sourcilleuse dureté. Quand l’aïeule dut quitter la maison qu’elle habitait depuis 1948, où il semblait dangereux qu’elle restât seule après ce grand affaiblissement qu’elle avait reçu de la mort de René – mais le péril était-il si pressant, et ne l’avait-on pas exagéré pour précipiter les choses ? – Yvette avait recueilli Marie-Louise chez elle, le temps de lui trouver cet hospice au Vesnil, à une quinzaine de kilomètres. Rien à voir avec l’asile, bien sûr, chacun en parle pompeusement comme du Home, dont Mémé occupe une des plus belles chambres, donnant directement sur le parc et la Vesne par deux grande fenêtres surmontant la marquise, au-dessus du perron d’honneur. Ses principaux meubles l’ont suivie, et elle y a à peu près reconstitué la pièce d’apparat de l’ancien appartement. La table y est convenable, et pour la compagnie qu’est-ce que tu veux, c’est celle d’une société dont le benjamin doit avoir soixante-dix ans et la doyenne quatre-vingt-seize !
Malou ne se plaint jamais, question fierté et force de caractère elle dame le pion à sa fille. Dans ce Home, celle-ci lui rend ponctuellement visite chaque vendredi. Si financièrement elle est indépendante, elle s’en remet à Yvette pour toutes sortes de services, les formalités administratives, l’habillement ou la pharmacie… En l’installant dans cette maison, il est clair que sa fille l’a délibérément placée à bonne distance – mais non moins évident qu’elle veillait sur elle, et inconcevable qu’elle l’ait abandonnée. « Mon pauvre enfant, ta mère nous a laissés tomber », répète-t-elle au téléphone. Que répondre ? Pierre a échafaudé à son intention la théorie d’une amnésie, qu’il cautionne de l’expérience thérapeutique de Maud à l’hôpital : Maman souffre d’un raptus, son esprit est intact pour tout ce qui concerne la vie courante, la conduite automobile, les conversations, etc., mais elle a scotomisé tout le secteur familial, elle ne sait plus qu’elle a une mère, un mari, des enfants, elle se donne une autre personnalité, elle fait ce dont elle a toujours rêvé, un long voyage mais tu verras, un matin elle va se réveiller bien étonnée, demander où elle est et nous téléphoner…
Pierre a dû trouver l’accent qui convenait car Malou, manifestement, l’a quitté plus tranquille. Au point que lui-même commence à croire à cette nouvelle version. Il en parle à Maud qui lui confirme que, psychologiquement, ce n’est pas tout-à-fait impossible mais qu’enfin, si leur mère jouait les voyageurs sans bagages elle atterrirait rapidement dans un service psy, lequel au vu de ses papiers aurait déjà prévenu la famille. N’empêche, deux ou trois jours durant Pierre s’accroche assez à cette construction pour la resservir à sa belle-mère, venue téléphoniquement aux nouvelles, avec le même genre de succès. Ce qu’on est prêt à croire pour reculer l’échéance ! Afin de tester l’hypothèse, il a même crayonné une sorte de récit, l’esquisse d’un filage.
Tu avances sur une route blanche, une piste de poussières et de cailloux, d’où tu voudrais découvrir la mer. Tu foules une plage jonchée d’objets brillants et fragiles qui craquent sous les pas, carapaces, couteaux, fines coquilles polies sous le ressac, croûtes cristallisées du sel et du sable. Une ligne de déchets de bois et de plastiques marque la hauteur de la dernière marée, il faut éviter de franchir cette barrière au-dessous de laquelle les pieds enfoncent dans le sable humide. Tu évites aussi les galettes de mazout plaquées un peu partout. L’appel des mouettes vibre douloureusement à ce promontoire de la solitude. Tu te protèges les yeux de la main quand sur ton visage tourné vers le faible soleil hivernal passe l’ombre d’un grand oiseau criard. Tu as laissé tes gants et ton écharpe dans la voiture, et malgré ton manteau de cuir noir tu crains de prendre froid. Sous les lanières de la lumière la mer te semble lourde et un peu sale, tu n’as pas envie de t’asseoir au creux d’un rocher visqueux, pas envie de marcher pieds nus de flaque en flaque, guetter les crabes ou observer à l’échelle d’une mare la vie mystérieuse de l’océan. Mieux vaut rentrer à travers les dunes où tremblotte une herbe rare, tes traces y dureront quelques heures entre les chardons bleus des sables. Qu’as-tu à faire de ce pays aux fleurs déchiquetantes, aux alignements de villas uniformément closes face à la mer ? Aller, venir du bocage aux marais salants, d’eaux mortes en miroirs gris ; s’arrêter à midi dans un restaurant de routiers, y déjeuner d’une omelette et d’un plat de charcuterie ; la passagère n’a rien à dire à ces hommes de bruit et de fumée qui la remarquent à peine, elle ne fait que glisser en silence, règle son addition sans demander plus que la confirmation d’une direction sur la carte, la distance d’une ville neutre qu’elle a choisie pour l’étape, où elle retirera tout à l’heure sa clef à la réception de l’hôtel recommandé, après avoir visité les restes d’un fort, ou traversé une place au kiosque à musique entre les rangées de marronniers… Personne nulle part ne l’attend, sait-elle qu’elle est partie un beau jour de septembre en abandonnant sa mère, son mari et le petit Olivier ? Il n’est pas vraisemblable qu’elle s’en souvienne, elle serait déjà de retour avec un sourire de défi ou un murmure d’excuse ; il faut donc que cette femme soit devenue folle et déguise sa course errante sous l’apparence d’une promenade studieuse, hochant la tête aux explications débitées par les guides, épuisant les couleurs de l’automne de forêts domaniales en parcs municipaux, roulant son triste cœur assoiffé de déserts, toujours correctement mise dans la station thermale ou les gîtes ruraux, touriste grise calculant son pourboire, évitant les surprises, réglant l’horaire de ses excursions comme est réglée la minuterie du couloir de cette chambre où elle va s’endormir, seule entre les draps raides et un peu humides, voyageuse appliquée, posée –
A d’autres, ça ne colle pas, ça ne cadrera jamais ! Ce voyage est absurde et ne peut exister. Que sa mère soit en vacances, Pierre d’une certaine façon l’a toujours su, c’est même la trame de ses propos chez Hache, il y a bien longtemps qu’Yvette manque à sa place. Mais pas de cette façon distraite, évaporée. L’évidence maternelle pour lui, c’est celle du regard crispé, le maintien de la sentinelle. L’hypothèse de la vadrouille est impensable, grossière, blessante aux souvenirs. Que son père puisse soutenir cette fable – et Pierre frissonne au moment d’achever sa phrase, qu’il s’entend prononcer avec stupeur sur le divan hebdomadaire – « cela explique pas mal de choses ».
*
« J’ai vu ta mère ! » hurle Maud, elle allume, les voilà tous deux réveillés. Elle vient de rêver d’une petite tente plantée au flanc du Puy-de-Dôme, Yvette était partie faire du camping en solitaire, elle est morte en dormant, on ne l’a repérée que plusieurs jours après, « ses pieds dépassaient ».
Combien de temps ça va-t-il continuer ? On ne sait plus quoi imaginer, vivement la réalité, n’importe quoi plutôt que ces micmacs téléphoniques, ce colin-maillard d’élucubrations folâtres. S’il fait calmement le point, et quelque raisonnement qu’il se tienne, Pierre conclut à sa mort, non par accident mais par suicide. Oui mais voilà, faire disparaître la voiture c’est facile, il lui suffisait de la garer convenablement, mais son corps ? S’est-elle rendue à pied dans un endroit sauvage, la côte de Quiberon par exemple qu’elle affectionnait particulièrement, ou au sommet d’un rocher abrupt d’où elle aurait sauté ? Pierre songe au geste désespéré d’un ami, Eric, maniaco-dépressif comme ils disent, du haut des falaises du Saint-Eynard, « il a sauté plus haut que son père » (qui s’était lui défenestré) a sobrement commenté le psychanalyste, on ne l’a retrouvé que cinq semaines plus tard au pied du cône d’éboulis, un berger appelé par son chien… Non, c’est une mort qui défigure, qui agresse trop le corps, Pierre sait sa mère intrépide mais pas pour ça, elle garde le souci d’une certaine élégance, ce suicide ne lui ressemblerait pas. Il croit plutôt qu’elle a dû se tuer pas très loin de la maison. Par exemple, après avoir laissé ce billet qui déguisait son départ, il la voit roulant en direction du Home pour dire à sa mère un dernier adieu, sans l’inquiéter bien sûr, lui annoncer simplement son petit voyage aux Chatoux, qu’elle ne pourra venir vendredi, etc. Mais sur la moitié du parcours, la route longe la Vesne, de si près que l’hiver parfois elle est inondée. Allons, pourquoi attendre, à quoi bon cette comédie pénible là-bas auprès de Malou ? Autant en finir tout de suite. Il la voit bouclant sa ceinture, ouvrant les vitres et dirigeant froidement la voiture par-dessus la berge, là où il y a par exemple des appontements, les rampes de hâlage des voiliers – plouf ! S’il fait nuit, ni vu ni connu. Et par temps sec, pas de traces. Le fleuve est assez rapide et profond par endroits, il faut vite que j’en parle à Papa et qu’on fasse draguer.
Ou bien elle aura gardé une clef de l’ancienne maison. On doit la démolir mais elle est toujours là, déserte, il suffit d’entrer. Elle s’y dirige les yeux fermés, tu parles si elle connaît les lieux, et comme chambre là-dedans elle a vraiment l’embarras du choix, elle ne sera pas dérangée. Elle gare la voiture proprement dans n’importe quel parking, et elle rentre chez elle avec son flacon de barbituriques et un petit matelas. « Mais nom de Dieu voilà ce qui a dû se passer, avez-vous songé à fouiller aussi la rue du Miroir ? – Non, dit Babeth qui téléphone ce jour-là de Blégis, mais je vais en parler à Bon-Papa ». En attendant, elle a dressé l’inventaire des affaires de sa marraine, elle les connaît exactement. Eh bien c’est navrant, et elle en parle des larmes dans la voix, mais elle a tout retrouvé, même sa brosse ronde à cheveux, Vetou n’a rien emporté ! Brave Elisabeth, elle refuse pourtant de désespérer. Elle a écrit à plusieurs journaux pour insérer un avis de recherche, La Montagne a publié en bonne place une photo et un signalement assez détaillé et, dans Le Monde d’hier, elle a obtenu un avis de trois lignes.
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